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adam bede.

fatiguer ; et penser à tout ce qu’il a fait pour la ferme, sans qu’on lui fournisse jamais un sou, que les temps soient bons ou mauvais ! Et, comme je lui ai souvent dit, je suis sure que si le capitaine y pouvait quelque chose cela n’irait pas ainsi. Ce n’est pas que je veuille parler avec peu de respect de ceux qui ont le pouvoir en main. Mais c’est plus que la chair et le sang ne peuvent supporter quelquefois que de travailler à s’abîmer ; se lever matin et se coucher tard, et, une fois au lit, ne pas oser fermer l’œil en pensant que le fromage peut se boursoufler, ou que les vaches peuvent perdre leurs veaux, ou que le froment peut moisir en gerbe. Après tout, à la fin de l’année, c’est comme si, après avoir apprêté un festin, vous n’en aviez que l’odeur pour vos peines. »

Madame Poyser, une fois lancée dans la conversation, vaguait toujours, sans être retenue par son respect préliminaire pour ces gens bien nés. La confiance qu’elle avait en ses propres moyens pour exposer les faits était la force qui surmontait toute résistance.

« Je craindrais que cela ne fît plus de mal que de bien si j’allais parler de portes, madame Poyser, dit le capitaine, quoique je puisse vous assurer qu’il n’y a pas un homme sur la propriété pour qui je voulusse dire un mot plutôt que pour votre mari. Je sais que sa ferme est mieux tenue qu’aucune autre à dix milles à la ronde. Et pour la cuisine, ajouta-t-il en souriant, je ne crois pas qu’il en existe une supérieure dans tout le royaume. À propos, je n’ai jamais vu votre laiterie ; il faut que je la voie, madame Poyser.

— Vraiment, monsieur, elle n’est pas digne que vous y entriez, car Hetty est après à faire le beurre, parce qu’on a battu plus tard et j’en suis tout à fait honteuse. » Madame Poyser, en disant cela, rougissait et croyait que le capitaine s’intéressait véritablement aux terrines de laitage et formerait son opinion sur elle d’après l’apparence de sa laiterie.