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adam bede.

nièce à moi peut être la cause du renvoi de mon mari de sa ferme ! moi qui ne lui ai rien apporté que mes économies.

— Non, chère tante Rachel, dit Dinah avec douceur, vous n’avez aucune raison d’avoir de telles craintes. J’ai l’assurance certaine qu’il ne peut vous arriver aucun mal, ni à M. Poyser ou les enfants de ce que j’ai fait. Je n’ai pas prêché sans direction.

— Direction ! Je sais bien ce que vous entendez par direction, dit madame Poyser, tricotant d’une manière plus rapide et plus agitée. Quand il y a dans votre tête une lubie plus grosse qu’à l’ordinaire, vous l’appelez une direction et rien ne peut vous arrêter ; vous ressemblez à la statue qui est en dehors de l’église de Treddleston, qui a les yeux fixes et sourit, qu’il fasse beau ou mauvais temps. Je n’ai pas peu de patience avec vous. »

À ce moment, les deux messieurs avaient atteint la palissade et étaient descendus de leurs chevaux ; il était évident qu’ils allaient entrer. Madame Poyser s’avança à leur rencontre, en faisant de grandes révérences et tremblante à la fois de colère contre Dinah et d’anxiété pour se conduire elle-même convenablement en cette occasion. Car, à cette époque, même les campagnards de l’esprit le plus fin ressentaient une crainte respectueuse devant les gens plus haut placés, telle que l’éprouvaient ces hommes des temps fabuleux quand ils voyaient passer leurs dieux sous forme humaine.

— Eh bien, madame Poyser, comment vous portez-vous après cette matinée orageuse ? dit M. Irwine avec sa cordialité de bon ton. Nos pieds sont tout à fait secs ; nous ne salirons pas votre superbe plancher.

— Oh ! monsieur, n’en parlez pas, dit madame Poyser. Voulez-vous prendre la peine de passer dans le salon avec M. le capitaine ?

— Non, certainement, je vous remercie, dit le capitaine