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choses de cette vie, et il est bien aussi que les hommes aient les joies de la famille et pourvoient à leur entretien, en tant qu’ils le fassent dans la crainte du Seigneur, et pensant aux besoins de l’âme aussi bien qu’à ceux du corps. Tous nous pouvons servir Dieu, quel que soit notre lot ; mais il nous appelle à différents genres d’ouvrage, de même qu’il nous rend propres à ceux auxquels il nous destine. Je ne puis pas plus m’empêcher de consacrer ma vie à mon entreprise, qui est de faire du bien aux âmes des autres, que vous ne pourriez vous empêcher de courir si vous entendiez pleurer la petite Totty à l’autre bout de la maison. Sa voix vous irait au cœur, vous la croiriez malheureuse ou en danger, et vous ne pourriez hésiter à courir la consoler ou la sauver.

— Bah ! dit madame Poyser en se levant et allant vers la porte ; je sais bien que ce serait de même si je vous parlais plusieurs heures de suite. Vous me feriez toujours la même réponse. Je ferais aussi bien de parler au ruisseau et de lui dire de s’arrêter. »

La dalle de pierre, devant la porte de la cuisine, était maintenant assez sèche pour que madame Poyser pût s’y tenir sans crainte et voir ce qui se passait dans la cour, le bas gris chiné faisant en même temps de rapides progrès. Mais elle n’y était pas depuis plus de cinq minutes qu’elle rentra et dit à Dinah d’une voix animée et presque effrayée :

« Voilà-t-il pas le capitaine Donnithorne et M. Irwine qui entrent dans la cour ! Je parierais ma vie qu’ils viennent parler de votre prédication sur la Pelouse, Dinah ; c’est à vous de leur répondre, car je serai muette. Je vous en ai déjà assez dit de la défaveur que vous apportiez sur la famille de votre oncle. Cela ne me ferait rien, si vous étiez la propre nièce de M. Poyser — les gens doivent s’arranger de leurs proches comme ils s’arrangent de leur nez ; — c’est leur propre chair et sang. Mais penser qu’une