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mée en arrière, et l’éloignait de l’Asie, il s’écria :

— « Oui, Jérusalem ! Croyez-vous donc, messieurs, qu’il suffise de vos bras et de ma puissance pour conquérir le monde ? Est-ce dans cette contrée sainte que nous oublierions la Providence et le Dieu des armées ? Nous allons quitter Damas, et marcher à Jérusalem. »

L’étonnement du conseil avait crû au plus haut degré. Ils se regardaient en silence ; ils ne comprenaient pas ces paroles si inattendues et dont l’empereur seul savait la portée.

La défaite de Saint-Jean-d’Acre avait révélé à son esprit une pensée nouvelle. Il avait vu sa fatalité et sa gloire céder devant l’enthousiasme religieux des Turcs, et cette armée, animée par une foi immense, vaincre la sienne. Il considérait que l’Asie, pour les batailles, ne ressemblait plus à l’Europe ; que ses marches savantes, ses tactiques habiles, son génie militaire, ne retrouvaient plus les mêmes ennemis, et que les échos de l’Orient ne retentissaient pas aussi effrayés au bruit de ce nom qui seul, dans la froide Europe, gagnait des batailles.

Mais, dans cette terre mystérieuse d’Asie, une force nouvelle lui apparaissait : la foi religieuse, le fanatisme, force incalculable, parce qu’elle est au-delà de l’humanité, et à laquelle il faut