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Nous nous arrêtons devant l’entrée principale et, durant une heure, sous un soleil de plomb, nous devons assister à un nouveau défilé des troupes et à des fantasias remarquablement exécutées. Les femmes, exclues de ces cérémonies, contemplent les soldats derrière les tapades en paille, et manifestent leur enthousiasme par des you-you perçants.

Enfin la porte s’ouvre, le chef des esclaves, ayant derrière lui une douzaine de serviteurs, s’avance vers nous et me revêt de deux boubous, l’un bleu, l’autre blanc, et en donne un à Ahmed. Après quoi, on nous invite à nous retirer chez nous.

Ce n’est pas seulement dans les nations européennes que les grands font faire antichambre. Nous rentrons à notre logis prendre un peu de repos, que la chaleur du jour et les fatigues de la réception rendent indispensable, et on vient nous prévenir que le sultan nous recevra le lendemain, en audience publique.

De bonne heure nous nous mettons en route. Comme j’étais plutôt en assez piètre équipage, j’avais fait revêtir à Ahmed son plus beau costume. Après une attente de dix minutes sur la place, on nous introduit. Le sultan, installé dans un grand hall carré recouvert de draperies multicolores, est à l’abri des regards indiscrets derrière une natte. Devant le hall est une immense tente en poil de chameau sous laquelle se tiennent, assis sur le sable, les ministres et les notables. Avant de prendre place à droite et à gauche du sultan, tous s’agenouillent et mettent leur front à terre.

Debout, au milieu de la foule, je présentai mes compliments au sultan et, ne désirant pas me compromettre, je lui fis simplement expliquer par Ahmed le but pacifique de notre mission et notre désir d’établir des relations commerciales avec le Baguirmi.

Il me répondit qu’il était heureux de nous recevoir chez lui et qu’il verrait volontiers les Français trafiquer dans son pays. Après quoi nous nous retirâmes sans avoir vu le souverain demeuré derrière sa natte.

Dans l’après-midi, je voulus visiter la ville et je m’arrêtai au marché. Malheureusement l’heure des transactions importantes