hanné, où nous nous arrêtons, pour demander s’il serait possible d’envoyer une lettre au sultan. On nous répond que les villes de Bousso, Maffaling et Mondo jouissent seules du privilège de fournir des courriers pour le sultan. Nous cherchons à obtenir des détails sur le voyage de Nachtigal, qui a franchi le Chari en cet endroit ; on nous répond que nous sommes les premiers Européens qu’on voit dans la région, que tout le pays est terrorisé par la vue de « notre maison qui marche sur l’eau ». Certains même disent qu’ils nous ont vus descendre du ciel après un orage très violent…
Bien que la partie intelligente de la population ait entendu parler des vapeurs par ceux d’entre eux qui ont accompli le pèlerinage de la Mecque, on s’imagine aisément que l’impression produite par notre arrivée si soudaine ait été plutôt de la crainte. D’où venions-nous ? Où allions-nous ? Venions-nous en amis du Baguirmi ou de Rabah ? Autant de mystères pour tous ces gens.
Nous quittons bien vite Baïnhanné et, en passant à Mondo, région commandée par Souleyman, beau-frère du sultan, nous avons la bonne fortune de trouver un esclave de ce chef, qui veut bien se charger d’une lettre pour le sultan Gaourang. Ne voulant pas attendre la réponse à cet endroit, nous continuons notre route dans l’intention de nous rapprocher du Tchad. Mais en arrivant en face de Baleignéré, nous sommes invités par une délégation des notables de l’endroit à ne pas dépasser ce point, et à y attendre une réponse du sultan. J’en profite pour confier une nouvelle lettre à un de mes Sénégalais les plus intelligents, nommé Boubakar, avec ordre de la porter à Massénia.
Nous séjournons douze jours au même endroit sans recevoir la moindre nouvelle. Très bien reçus néanmoins par les gens du pays, dont beaucoup parlent arabe, nous passons nos journées à nous documenter sur le pays. Des informations ainsi obtenues, il résulte que le pays du Baguirmi, à peine relevé de la guerre soutenue en 1870 contre le Ouadaï, a eu à subir, du fait du passage de Rabah, un choc formidable dont l’effet se fait encore