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gea immédiatement, et ils se mirent en route. Cette première expérience réussit au delà de mes espérances. Pas une charge ne manqua à l’appel. Le portage était créé. Payés très régulièrement, les porteurs arrivèrent assez facilement. Le camp des Ungourras, composé d’abord des quelques cases construites par les indigènes, devenait plus habitable. Sous l’énergique impulsion d’Huntzbüchler, un grand magasin en pisé s’élevait ; des cases pour Européens s’édifiaient. Le Bihan dirigeait les convois. Bref, vers la fin de juin, malgré les pluies qui commençaient à tomber depuis un mois, il ne restait plus grand matériel à Krebedjé. À part un boat en acier venant de Brazzaville, tout était transporté.

Ce boat pesait près de 800 kilogrammes, était long de 9 mètres, large de 2. C’était une pièce difficilement transportable ; il fallait cependant que ce travail se fît. N’ayant avec moi aucun mécanicien, excepté un forgeron sénégalais, je dus couper cette embarcation en deux, c’est-à-dire faire sauter les rivets réunissant les diverses plaques, suivant un plan latitudinal dans les environs du centre de l’embarcation. Ceci fait, c’étaient encore deux colis de 400 kilos chacun à porter. Ce fut très dur ; les indigènes, découragés, n’y mettaient pas grand enthousiasme.

Enfin, à force de patience et grâce à quelques cadeaux faits à propos, le boat rejoignait le reste des charges. Nous étions alors au 10 juillet.

Un courrier venu quelques jours auparavant m’annonçait l’arrivée d’un petit convoi à Ouadda, composé de quelques vivres. Ce n’était pas suffisant, car les perles de verre qui nous servaient à faire nos achats de vivres allaient nous manquer ; il nous en restait à peine une douzaine de caisses. Que faire ? Ces perles qui constituaient à peu près l’unique moyen d’échange étaient pour nous indispensables… J’avais entendu dire qu’une des factoreries de la Société anonyme belge entrait en liquidation ; peut-être trouverais-je là de quoi m’approvisionner. Mais cette factorerie, située à Banzyville, en face de Mobaye, étant distante de Krebedjé de plus de 500 kilomètres,