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aucun résultat. Il n’empêche pas le succès final du rival, il le retarde, c’est tout ; mais il a pour conséquence de montrer à l’indigène, au musulman surtout le manque d’entente existant entre les chrétiens, manque d’entente dont il profitera à la première occasion.

Prenons par exemple ce qui peut se produire entre l’Angleterre et nous. Les Anglais ont à conquérir le Sokoto. En y employant des moyens suffisants, il n’est pas douteux qu’ils ne viennent facilement à bout de leurs adversaires. Au contraire, si le sultan de Sokoto battu une première fois, est accueilli dans nos possessions, si on le réapprovisionne en secret d’armes et de munitions, la lutte reprendra et se continuera longtemps, occasionnant aux Anglais des pertes en hommes et en argent fort appréciables.

En revanche si nous pouvons gêner les Anglais au Sokoto, ils peuvent nous rendre la pareille au Ouadaï. L’emploi de pareils procédés est donc contraire au bon sens, à l’intérêt bien compris des deux nations et ne peut avoir pour conséquence qu’un antagonisme dont on ne peut prévoir les suites.

Il s’en suit donc qu’un « modus vivendi » spécial s’impose aux trois grandes nations qui ont assumé la tâche de conquérir et de civiliser l’Afrique. Ce « modus vivendi » reposant sur leur bonne entente réciproque et le cas échéant sur leur coopération complète contre l’ennemi commun « le musulman fanatique » facilitera grandement leur tâche immédiate de l’occupation. Il sera toujours temps plus tard d’engager la lutte commerciale qui fatalement interviendra dans l’avenir.