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devant de nous. Les femmes poussent des « you-you » perçants, les hommes brandissent leurs lances et tirent des coups de fusil. Confiant au capitaine Robillot le soin de s’occuper de l’opération du passage du fleuve, laquelle est d’ailleurs très simplifiée par le grand nombre de pirogues qui se trouvent accostées sur le rivage, je traverse le Logone pour me rencontrer sur la rive gauche avec le commandant Lamy, qui m’y attend entouré de tous ses officiers.


une cour de maison à koussouri.

Je laisse à penser quelle émotion profonde s’empare de nous tous. De semblables sensations ne se décrivent pas. Nous ne parlons pas, à vrai dire, mais les étreintes et les poignées de mains qui se distribuent sont tellement chaleureuses qu’elles en disent plus que de longs discours. La jonction des trois missions est donc un fait accompli. C’est la première fois que dans les annales coloniales on ait à citer un fait semblable.

Trois troupes parties l’une de l’Algérie, l’autre du Sénégal, la troisième du Congo, s’étaient rejointes en plein Centre Africain, malgré des difficultés de toutes sortes, malgré les pires souffrances, malgré les combats, malgré tout.

En vérité, une belle page d’histoire venait de s’écrire là. Elle réalisait définitivement le fameux programme tracé par le Comité de l’Afrique française, auquel s’étaient consacrés tant de dévouements, et qui avait déjà coûté tant de vies humaines… depuis Flatters, Crampel et Casemajou, jusqu’à Bretonnet et de Béhagle.