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le village de Gaoura où nous le rencontrâmes. Voilà ce que peuvent faire et ce que font tous les jours ces Sénégalais, à qui nous devons la conquête d’une partie de notre empire Africain. On conviendra aisément que la croix d’honneur, qui fut donnée par la suite au sergent Samba Sali, était largement gagnée.

Ainsi donc, c’était fini : le drame s’était accompli. Nous ne reverrions plus aucun des nôtres. Que faire ? Avant tout, éviter l’emballement qui est le pire des conseillers, et examiner froidement la situation.

Rabah était à Kouno, à une centaine de kilomètres de nous. Grisé par sa facile victoire qui avait produit une impression considérable sur les indigènes, il était à craindre qu’il ne tentât un nouvel effort contre nous et ne vînt nous attaquer avant l’arrivée de nouveaux renforts.

Il fallait se tenir en garde contre une surprise. En mettant les choses au pire, on avait au moins six jours devant soi pour se fortifier solidement. Je choisis en conséquence l’emplacement d’un poste et je donnai l’ordre au capitaine Robillot, commandant les troupes, de faire débarquer la compagnie Jullien, les deux pièces de 65 millimètres et les artilleurs, soit en tout cent vingt-huit fusils, et de commencer de suite la construction d’un blockhaus et d’un camp palissadé qui reçut le nom de Fort-Archambault, en souvenir d’un jeune officier de la compagnie Jullien, mort dans le Haut Oubangui.

Il était urgent d’amener de suite de nouveaux renforts au point occupé par Robillot ; d’autre part il ne fallait pas trop dégarnir la région civile commandée par M. Bruel, car on pouvait appréhender très bien une attaque de Senoussi sur le poste de Gribingui.

Il y avait lieu dans tous les cas d’opérer très vite. C’est pourquoi, je rembarquai sur le vapeur, le 19 août au soir, avec de Mostuejouls ; veillant à tour de rôle, nous pouvions effectuer notre montée jusqu’à Gribingui en cent soixante heures, dont cent trente de marche réelle ; les trente autres heures furent