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debout ; je le fais asseoir et je m’aperçois que son bras gauche pend lamentablement. Une balle lui a cassé l’os. Il a faim, on lui donne à manger et avidement nous l’interrogeons. Le pauvre homme, encore sous le coup des émotions terribles qu’il a supportées et des fatigues qu’il a endurées, a peine à se remettre. Il parle enfin, et nous fait le récit du malheureux drame auquel il vient d’assister.

Bretonnet, ainsi qu’il l’annonçait, avait fait évacuer Kouno, pour occuper les collines de Togbao. Ces collines, hautes au maximum de 100 à 150 mètres au-dessus du fleuve, sont assez difficilement accessibles. Elles se composent de deux sommets principaux, séparés par un étroit défilé et de deux autres petites collines voisines commandées par les deux points culminants A et B[1]. Un tata en palanques est occupé par les Baguirmiens et le lieutenant Durand-Autier, avec dix hommes et une pièce de 4. Le défilé entre A et B est défendu par les gens du « M’baroma », chef baguirmien. Bretonnet avec trente hommes, deux pièces de canon, le lieutenant Braun et le maréchal des logis Martin, sont installés sur les sommets C et D.

L’ennemi est signalé le 17 juillet vers S heures du matin. Rabah en personne dirige l’action. Il compte sous ses ordres treize bannières, soit un effectif de deux mille sept cents fusils et environ dix mille auxiliaires arabes ou bornouans, armés de lances et de flèches. Il esquisse une première attaque de front qui est repoussée vigoureusement.

Il réunit son monde, fait mettre pied à terre à ses cavaliers et lance de nouveau la moitié de ses soldats à l’assaut des positions occupées par les nôtres. Pendant ce temps, un autre groupe tournait la position pour s’emparer du défilé.

À la première attaque, le lieutenant Braun avait été tué raide ; le maréchal des logis Martin le remplaça. Bretonnet reçut alors une balle en pleine poitrine. On le coucha le dos appuyé contre une mallette en fer et il continua à diriger la défense. Sentant ses forces s’en aller, il demanda alors du papier et un crayon.

  1. Voir le plan aux Notes et éclaircissements. (Note 6 bis).