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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE

sane, » c’est-à-dire à la transgression du Testament, devient un autre corps, et non un corps saint dans une seule et même chair. C’est un païen sous le nom d’un Chrétien ; ses espérances ne sont pas les nôtres. Mais « celui qui adhère au Seigneur en esprit » devient, par la différence de l’union, un corps spirituel ; qu’est-ce à dire ? fils dans toute la vérité du mot, homme de sainteté, impassible, gnostique, parfait, formé à l’école du Seigneur, afin qu’après avoir adhéré d’actions, de paroles, et surtout d’esprit, au Seigneur, il aille recevoir les demeures promises à qui s’est élevé par ces moyens à la force de l’homme.

En voilà suffisamment pour qui a des oreilles. Il ne faut pas, en effet, mettre à nu le mystère : bornons-nous simplement à l’énoncer, pour réveiller la mémoire de ceux qui, participant déjà de la connaissance, comprendront dans quel sens le Seigneur a dit : « Soyez parfaits comme votre Père, » c’est-à-dire, en remettant intégralement les offenses, en oubliant les injures, en vivant dans une vertueuse impassibilité. Nous disons la perfection du médecin, la perfection du philosophe ; nous pouvons dire aussi, j’imagine, la perfection du Gnostique. Aucune d’elles toutefois, si élevées qu’elles puissent être, ne nous assimilent complètement à Dieu. Car nous ne répétons pas le blasphème impie des Stoïciens[1], qui ne donnent à l’homme et à la Divinité qu’une seule et même vertu. — Mais nous ne devons donc pas, me dira-t-on, être parfaits comme le veut le Père céleste ; car il est impossible à l’homme d’égaler la perfection de Dieu ? — Ce que demande le Père, c’est que nous devenions irréprochables et parfaits par une vie conforme aux prescriptions évangéliques. Cet oracle ayant été prononcé de manière à ce qu’il faille y sous-entendre quelque chose, si nous le complétons par ce qui lui manque, afin que la pensée l’embrasse intégralement, nous connaîtrons la volonté de Dieu, et nous vivrons avec une noblesse de sentiments et une piété qui répondront à la dignité du précepte.

  1. Voyez Diogène Laërte, liv. VII ; Cicéron, dans les Lois, livre I ; Origène contre Celse, livre IV ; et Sénèque, épître LXXIV, etc.