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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

naître d’un seul toute la race humaine pour habiter sur toute la face de la terre, déterminant les temps de la durée des peuples et les limites de leur demeure ; afin qu’ils cherchent Dieu et qu’ils s’efforcent de le toucher ou de le trouver, bien qu’il ne soit pas loin de chacun de nous ; car en lui nous ayons la vie, le Mouvement et l’être ; et comme quelques-uns de vos poètes ont dit : Nous sommes les enfants de Dieu même. » De ces paroles, il résulte évidemment que l’apôtre approuve ce qu’il y a de bon dans les auteurs grecs ; il se sert d’exemples tirés de leurs poètes comme ceux qu’il prend aux livres des phénomènes célestes du poète Aratus. Il montre aussi que leur Dieu inconnu est une périphrase sous laquelle, à défaut du mot propre, les Grecs adoraient le Créateur ; et qu’il faut apprendre les attributs réels du Créateur, non plus sous la forme d’une périphrase, mais d’une manière positive, et le connaître lui-même par la personne du fils. « Je t’ai donc envoyé vers les gentils, dit le Seigneur, pour leur ouvrir les yeux, pour qu’ils passent des ténèbres à la lumière, et de la puissance de Satan à Dieu, et que, par la foi qu’ils auront en moi, ils reçoivent la rémission de leurs péchés et « qu’ils aient part à l’héritage des saints. » Les Grecs sont donc les aveugles dont on ouvre les yeux : connaître le père par la personne du fils, c’est saisir le vrai sens de la périphrase grecque, et « passer de la puissance de Satan à Dieu, » c’est être délivré de la servitude du péché.

Cependant nous n’admettons pas absolument toute philosophie, mais celle dont Socrate aussi parle dans Platon : « Car, selon le proverbe en usage parmi les initiés, il y a beaucoup de Porte-thyrse, mais peu de Bacchus. » Socrate donne ainsi à entendre que beaucoup sont appelés, mais que peu sont élus. C’est pourquoi il ajoute en termes formels : « Les Bacchus, à mon avis, ne sont autres que les philosophes qui ont su prendre le droit chemin. Pour être de leur nombre, je n’ai, autant que possible, rien négligé dans la vie ; loin de là, j’ai mis tout en œuvre. Mes efforts émanaient-ils d’un bon principe et ont-ils été dirigés dans une direction convenable ?