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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

tit constamment aux oreilles du Gnostique, il demande que ses persécuteurs reviennent à résipiscence. Car, d’aller contempler au cirque l’exécution des malfaiteurs, c’est un spectacle qui ne convient pas même à ceux qui ne sont qu’enfants dans la foi. Ces scènes hideuses deviendront-elles jamais une école d’enseignement ou un principe de plaisir pour le Gnostique qui s’est exercé au bien et à l’honnêteté par un choix volontaire ? Aussi, toujours armé d’un courage invincible contre les voluptés, et vivant loin de toute prévarication, n’a-t-il pas besoin que le supplice d’autrui le châtie et le réforme. Les voluptés de la terre ! les grossiers spectacles du monde ! que peuvent-ils pour celui qui regarde avec indifférence les promesses de la vie présente quoiqu’elles aient Dieu lui-même pour auteur ?

Tous ceux qui disent : « Seigneur, Seigneur, n’entreront point pour cela dans le royaume de Dieu, mais bien celui qui fait la volonté de Dieu. » Ce serviteur fidèle, sera l’ouvrier gnostique qui triomphe des désirs du monde, quoiqu’il demeure encore dans la prison de la chair. Tout invisible qu’est aux yeux de la chair l’avenir qu’il connaît, il est si fermement convaincu de sa réalité, qu’il le regarde comme plus présent que le présent lui-même. Ainsi fait l’habile ouvrier : il se réjouit des biens qu’il connaît. Laissant le corps rouler dans les nécessités de la vie matérielle, il se replie tout entier au fond de son âme, où il attend qu’il soit jugé digne de participer efficacement aux biens qu’il possède par l’intuition. Voilà pourquoi il use de cette vie comme d’une possession étrangère, aussi longtemps que la nécessité l’exige. Il pénètre aussi la signification symbolique du jeûne que l’on observe au quatrième et au sixième jours[1], c’est-à-dire aux jours de Mercure, et de Vénus.

  1. Le jeûne du mercredi et du vendredi remonte à la plus haute antiquité, comme l’attestent les Constitutions apostoliques, liv. V, ch. xix. Nous savons que saint Nicolas ne prenait point de lait ces jours-là. Pierre d’Alexandrie, évêque et martyr, saint Ignace, saint Épiphane, Tertullien, etc., parlent à plusieurs reprises de ce jeûne comme d’une pratique usitée depuis longtemps.