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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

CHAPITRE IV.
Les païens ont et les mouvements intérieurs de l’âme : de là l’origine et le berceau de toute superstition.

Les Grecs, peu contents d’attribuer aux dieux la forme de l’homme, les assujettissent aussi à nos passions. Chaque peuple leur prête sa ressemblance personnelle. « Les Éthiopiens, dit Xénophane, les représentent avec un visage noir et un nez camard ; les Thraces leur donnent des yeux azurés, et une figure qui tire sur le rouge. » De même les fabricateurs des dieux leur supposent une âme semblable à la leur. Interrogez le Barbare ; ses dieux ont des mœurs sauvages et brutales ; le Grec, ses dieux sont plus civilisés, mais accessibles néanmoins à toutes nos passions, Qu’arrive-t-il de là ? que nécessairement les méchants conçoivent de la Divinité des opinions mauvaises ; les hommes vertueux, de vertueuses opinions. Voilà pourquoi le Chrétien, dont l’âme est royale et versée dans la gnose, aussi fidèle adorateur de Dieu qu’il est éloigné de toute superstition, croit fermement qu’il n’existe qu’un seul Dieu, digne d’adorations, vénérable, magnifique, bienfaisant, auteur suprême de tous les biens, mais étranger à tous les maux.

Nous avons convaincu suffisamment les Grecs d’idolâtrie dans l’ouvrage que nous avons appelé Exhortation, où nous avons cité de nombreux témoignages qui allaient à notre but. Nous ne voulons point revenir sur une démonstration évidente. Mais, puisque notre sujet nous ramène à cette question, il nous suffira, pour éclaircir la discussion présente, de choisir dans la foule de nos autorités une ou deux preuves pour attester qu’assimiler Dieu aux hommes les plus pervers, c’est faire acte d’impiété. Dans la pensée de ces profanateurs, de deux choses l’une : ou les dieux sont outragés par les hommes, et dès lors l’offensé paraît manifestement inférieur à l’homme qui l’of-