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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

progrès en progrès jusqu’à l’impassibilité elle-même, pour entrer dans l’âge de perfection, c’est-à-dire, dans ce que la connaissance et l’héritage ont de plus éminent ?

Ces salutaires révolutions sont différenciées d’après l’ordre dans lequel elles s’accomplissent, par des temps, des lieux, des dignités, des connaissances, des héritages et des ministères appropriés à chacune d’elles, jusqu’à ce que vienne la transcendante et indéfectible contemplation du Seigneur. Ce qui est aimable de sa nature attire à la contemplation de son essence quiconque livre toutes les facultés de son être à la contemplation, par amour pour la connaissance. De là vient que le Seigneur, puisant à une source unique, a donné des commandements primitifs, puis des commandements postérieurs, ne voulant pas que ceux qui avaient précédé la loi vécussent sans règle fixe, ni que les peuples étrangers à la philosophie barbare s’emportassent à tous les excès, sans frein pour les retenir. Aux uns donc les préceptes ; aux autres la philosophie. Par là, il fermait la porte à l’incrédulité jusqu’à son avènement, époque où quiconque ne croit pas demeure sans excuse. Que le point de départ soit grec ou barbare, n’importe, il conduit à la perfection qui vient de la foi. Mais qu’un membre de la gentilité, franchissant la philosophie grecque qui a brillé la première, embrasse tout à coup la véritable doctrine, si grossier qu’on le suppose, il laisse les autres à un immense intervalle derrière lui puisqu’il a choisi par la foi la route abrégée du salut et de la perfection. Tout ce qui n’entravait pas l’exercice du libre arbitre, est devenu par le Seigneur l’auxiliaire de la vertu, afin que, d’une façon ou d’une autre, les hommes, au regard court et débile, pussent entrevoir dans l’Être unique et tout-puissant un Dieu plein de miséricorde, qui nous sauve d’âge en âge par l’intermédiaire de son Fils. Mais il n’est en aucune manière le principe du mal. Le plan de la création, dans son ensemble comme dans ses détails, a été combiné pour le salut universel par celui qui est le maître universel.

La fonction de la justice, qui opère le salut, consiste donc à conduire, dans la mesure du possible, chaque être à ce qui lui