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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

ment exposés au soleil. Ici, nous cherchons les rayons de l’astre pour nous réchauffer ; là, nous nous efforçons d’être Chrétiens pour être des hommes de bien dans toute la rigueur du mot. Le royaume des cieux appartient, en effet, à ceux qui se font le plus de violence, à ceux que l’examen, la discipline et l’exercice parfait investissent des honneurs de la royauté. Imiter une opinion, c’est prouver que l’on en avait quelque préjugé antérieur. Mais qu’on vienne à recevoir une parcelle de la vérité, vivante étincelle que l’on réchauffe au fond de son âme par le pieux désir et par l’enseignement ; on remue ensuite le monde pour monter au faite de la connaissance. Ce que nous ne saisissons point par la pensée, nous ne pouvons, en effet, ni le désirer, ni en tirer quelque profit. Parvenu à ces hauteurs, le Gnostique embrasse, comme point culminant de la perfection, l’imitation de son maître, autant du moins qu’elle est permise à la faiblesse de l’homme, s’imprégnant de la vertu du Seigneur, et se moulant à l’image de Dieu. Mais ignorer la connaissance, c’est n’avoir point de règle certaine pour mesurer la vérité. Renonçons donc pour jamais à participer aux contemplations gnostiques, si nous ne voulons pas vider notre âme de ses conceptions antérieures ; car on nomme communément et dans une signification générale du nom de vérité tout ce que perçoivent l’intelligence et les sens.

Sans doute, il est facile de distinguer la peinture véritable de la peinture vulgaire, et la musique vertueuse de la musique dissolue. Il y a donc aussi pour le philosophe une certaine vérité qui n’est pas la vérité des autres philosophes et une beauté réelle différente de la beauté adultère. Ce qui appelle nos efforts, ce ne sont point seulement les parcelles de la vérité que l’on décore du nom de vérité ; c’est la vérité elle-même qu’il faut poursuivre, sans nous arrêter à sa ressemblance. Car les paroles qui ont Dieu pour objet ne sont pas unes, mais innombrables. Nommer Dieu, ou ce qui concerne Dieu, est bien différent. En général, dans l’appréciation de toutes choses, il faut distinguer l’essence de ses accidents. Il me suffit assurément de dire : Dieu, c’est le maître de l’univers ; mais, dans un