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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

et sa fin un opprobre ! Comment est-il compté parmi les fils de Dieu, et comment son partage est-il entre les saints ? » Ce n’est donc pas seulement le fidèle, mais encore le païen, qui est à juste titre passible du jugement. Sachant, en effet, dans son éternelle prescience que la gentilité ne croirait pas en lui, Dieu néanmoins, pour l’élever à la perfection dont elle était susceptible, lui accorda la philosophie, mais seulement comme une préparation à la foi. Il lui donna pour objets d’adoration le soleil, la lune et les astres, que Dieu a faits pour les nations, dit la loi[1], de peur que, vivant sans Dieu et dans une complète impiété, elles ne périssent entièrement. Mais ces peuples ingrats, infidèles au commandement divin, adorèrent des images taillées. Or, si le même repentir ne les purifie pas, ils seront châtiés, ceux-ci, pour n’avoir pas voulu croire en Dieu, lorsqu’ils en avaient le pouvoir ; ceux-là, parce qu’avec la volonté d’être fidèles ils n’ont rien fait pour réaliser leur désir ; quelques autres même aussi, pour ne s’être pas élevés de l’adoration des astres à l’adoration de celui qui créa les astres. Encore un coup, Dieu avait suspendu sur leurs têtes les étoiles comme un chemin qui les conduisait à lui. Mais bien loin de s’en tenir aux corps lumineux qui leur avaient été accordés dans ce but, ils redescendirent des cieux pour s’agenouiller devant le bois et la pierre, « réputés dès lors comme une paille qu’emporte le vent, dit l’Écriture, comme une goutte d’eau qui tombe dans le vase ; » c’est-à-dire, estimés inhabiles au salut, et retranchés du corps de l’humanité !

De même qu’opérer son salut simplement est une œuvre moyenne, tandis que le faire dans toute la perfection du devoir est une œuvre entièrement bonne, de même toutes les œuvres du Gnostique sont marquées du sceau de la perfection ; celles du fidèle vulgaire n’ont qu’une bonté moyenne, parce qu’elles ne sont encore ni consommées par la raison ni dirigées par la science. Toutes les actions du Gentil, au contraire, sont des pé-

  1. Allusion un peu hardie au verset 19, chapitre iv, du Deutéronome.