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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

Psalmiste : « Vous avez éprouvé mon cœur, dit-il, et vous m’avez visité pendant la nuit ; vous m’avez fait passer par le feu de la tribulation, et l’iniquité ne s’est pas trouvée en moi. Que ma bouche ne serve pas d’interprète aux œuvres des hommes ! » Mais que dis-je, les œuvres des hommes ? Le Gnostique connaît le péché lui-même, non point par la voie du repentir, c’est là le propre des Chrétiens vulgaires ; mais il connaît l’essence elle-même du péché, et il condamne non pas tel ou tel péché, mais le péché en général. Quel est le péché commis par tel ou tel individu ? Il l’ignore ; il ne fallait pas le commettre ; voilà ce qu’il sait. Il y a donc deux espèces de repentir, le repentir ordinaire, qui vient à la suite du péché ; l’autre plus relevé qui, connaissant une fois la nature du péché, fait que nous renonçons d’abord au péché, d’où il suit que nous ne péchons plus.

Qu’on ne vienne pas nous dire que l’homme, souillé d’injustices et de péchés, tombe par le fait du démon. Avec un pareil raisonnement, il ne serait pas coupable. Mais le pécheur, choisissant par la transgression ce qu’ont choisi les démons, inconstant comme eux, frivole dans ses désirs comme eux, se transforme en une espèce de démon. Ainsi le méchant, devenu pécheur par sa méchanceté naturelle, s’est rendu lui-même vicieux par la possession de ce qu’il a librement choisi. Intérieurement enclin au mal, le mal passe de son âme dans ses actions, tandis que l’homme de bien agit toujours avec droiture.

C’est ce qui fait que nous appelons du nom de biens non seulement les vertus, mais encore les bonnes œuvres. Or, nous distinguons deux sortes de biens ; les uns sont désirables par eux-mêmes, tels que la connaissance, par exemple. En effet, aussitôt que nous la possédons, que demandons-nous, sinon de la posséder à tout jamais, de la prendre pour but et pour cause de nos efforts, et enfin de demeurer établis dans une éternelle contemplation ? Les autres biens sollicitent nos désirs par les conséquences qu’ils amènent avec eux. Ainsi de la foi, par exemple, parce qu’elle nous dérobe au supplice et nous mérite la récompense. La crainte, en effet, est un frein qui arrête