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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

CHAPITRE IX.
Le vrai Gnostique est entièrement libre de toutes les perturbations de l’âme.

Le privilège du véritable Gnostique, c’est de n’être assujetti qu’aux besoins dont l’entretien du corps réclame l’indispensable satisfaction, tels que la faim, la soif et les autres affections de même nature. Soutenir que dans le Sauveur le corps, en tant que corps, exigeait, pour sa propre conservation, les soins divers par lesquels nous alimentons notre vie, serait une assertion ridicule. Le Rédempteur mangeait, non pour soutenir son corps qu’entretenait et conservait une vertu divine, mais pour ne pas inspirer à ceux qui l’approchaient la pensée qu’il n’était qu’une vaine et fantastique apparition, comme l’ont proclamé plus tard quelques sectaires. Mais, dans le fond, il était inaccessible à toute passion humaine, sans trouble, sans agitation, supérieur au plaisir comme à la douleur. Quant aux apôtres, après avoir étouffé la colère, la crainte, et le désir par la doctrine du Seigneur et les trésors les plus abondants de la connaissance, ils parurent ignorer, depuis la résurrection de leur maître, jusqu’aux mouvements intérieurs qui semblent les plus innocents, tels que la hardiesse, l’émulation, la joie et le désir, établis dans une immuable tranquillité d’âme dont ils ne sortaient plus, étrangers à toute perturbation, et livrés à la constante pratique du bien. Sans doute, les impulsions précédentes n’ont rien de condamnable lorsque la raison les tempère et les dirige. Toutefois, elles ne peuvent trouver place dans l’âme du Chrétien parfait. À quoi lui servirait la hardiesse ? La vie ne pouvant amener pour lui aucun événement formidable, ni la tribulation aucune angoisse qui l’arrache à l’amour du Seigneur, le Chrétien parfait conséquemment n’est jamais en péril. Que ferait-il de l’allégresse ? Il ne tombe jamais dans la douleur, soutenu par la conviction que tout est bien. Jamais il ne s’irrite. Qui pourrait soulever les flots de la colère dans celui