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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

Théaridas écrit dans son Traité de la Nature : « Le principe de cet univers, le véritable principe, est un ; car il est éternel et dès lors unique. »

« Rien n’existe sans la volonté du monarque suprême ; »

dit Orphée. Le poëte comique Diphile, marchant sur les traces d’Orphée, écrit avec un sens profond :

« Le père de toutes choses, l’auteur et le créateur de tous les biens qui t’environnent, adore-le constamment ; adore-le lui seul. »

C’est donc à bon droit que Platon accoutume les natures d’élite à s’approcher de la science que nous avons reconnue déjà pour la plus sublime, à contempler le bien par excellence et à graviter vers lui par un effort soutenu. Il ne s’agit point ici d’une révolution indifférente et passagère[1], comme dans les jeux de l’enfance, mais d’un mouvement régulier « qui sorte l’âme de l’espèce de jour nocturne où elle était ensevelie, et la tourne vers la lumière de la vérité par la voie que nous appellerons dès lors la véritable philosophie. » Et ceux qui s’engagent dans ces routes, Platon les regarde comme appartenant à la race d’or. « Vous êtes tous frères, » dit-il. Or, tous ceux qui appartiennent à cette race d’or ont la faculté de juger sainement de toutes choses.

Ainsi donc, tous les êtres possèdent par une force instinctive, et sans le secours de l’éducation, le sentiment de l’existence de leur père et créateur commun. Des rapports de sympathie unissent la nature inorganique à la nature animée. Parmi les êtres vivants, les uns jouissent déjà de l’immortalité, les autres s’agitent et peinent encore tout le long du jour sur la terre. Parmi les mortels, ceux-ci sont livrés à d’aveugles terreurs et enfermés dans le sein qui les porte ; ceux-là se meuvent dans le libre exercice de leur indépendance. Puis la grande famille humaine se divise en Grecs et en Barbares. Dans ce nombre, pas une peuplade de laboureurs, pas une tribu no-

  1. Allusion au jeu de croix ou pile avec une écaille dont un côté était enduit de poix.