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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

Entendez-vous les Grecs eux-mêmes, tout ignorants qu’ils sont de la manière dont il faut savoir déifier, pour ainsi dire, la vie qui se règle sur la connaissance ? Qu’est-ce que la connaissance ? ils n’en ont pas l’idée, même en songe. Si donc il est avoué unanimement parmi nous que connaître c’est se nourrir du Verbe, bienheureux sont réellement, selon les paroles de l’Évangile, ceux qui ont faim et soif de la vérité, parce qu’ils seront rassasiés de l’aliment incorruptible ! C’est une chose admirable que d’entendre Euripide, ce poëte qui a fait monter la philosophie sur la scène tragique, s’accorder exactement avec ce que nous venons de dire, et désigner, par je ne sais quelle secrète inspiration, le Père et le Fils tout à la fois.

« À toi, s’écrie-t-il, à toi, roi suprême, cette libation et ce gâteau sacré ! À toi, Jupiter, ou Pluton, si ce dernier nom te plaît davantage ! Reçois avec faveur cette précieuse offrande qui se compose de fruits de toute nature, ainsi que cette coupe pleine jusqu’aux bords. »

Le Christ, en effet, est une oblation rare et auguste dans laquelle se résument toutes les perfections et qui s’est offerte pour nous à son Père. Les vers qui suivent prouvent plus clairement encore que le poëte, à son insu, parle du Sauveur lui-même :

« Car, de la même main qui parmi les dieux du ciel porte le sceptre de Jupiter, tu tiens les rênes de l’empire terrestre et infernal. »

Puis Euripide ajoute clairement :

« Envoie la lumière aux âmes des mortels qui désirent savoir d’où sont nés les luttes et les combats, quelle est la racine des maux, et auquel des bienheureux il faut sacrifier pour obtenir le repos de ses labeurs. »

Ce n’est donc pas sans raison que les purifications expiatoires sont les premières cérémonies dans les mystères de la Grèce, de même que le baptême ouvre la porte de la vie chez les Barbares. Puis viennent les petits mystères qui servent d’enseignement fondamental et de préparation aux grands mystères. Arrivé aux dernières épreuves, il ne reste plus rien à apprendre sur l’ensemble des choses : l’esprit n’a d’autre tâche