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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

donner un moment de regret ; suivant avec un joyeux empressement les pas du guide qui l’emmène hors de la vie, ne se retournant jamais pour regarder derrière lui ce qu’il quitte, remerciant Dieu de son pèlerinage ici-bas, le bénissant pour son rappel, et saluant avec amour la demeure qui lui a été préparée dans le ciel. « Nous savons, dit l’apôtre, que si cette maison terrestre où nous habitons vient à se détruire, Dieu nous donnera dans le ciel une autre maison, une maison qui ne sera point faite de main d’homme, et qui durera éternellement. C’est pourquoi nous gémissons, désirant être revêtus de la gloire qui est en cette maison céleste, si toutefois nous sommes trouvés vêtus et non pas nus. Parce que nous marchons vers lui par la foi, et que nous ne le voyons pas encore à découvert. Et nous aimons mieux être séparés de ce corps pour jouir de la vue de Dieu. » Nous aimons mieux ! ce dernier mot est un terme de comparaison : or, on ne compare entre elles que les choses susceptibles de ressemblance. Ainsi, l’homme qui est plus courageux que les autres, est plus courageux que les hommes de cœur ; et très-courageux par rapport à celui qui n’a pas de courage. Voilà pourquoi Paul ajoute : « Toute notre ambition est d’être agréables à Dieu, que nous vivions loin de lui, ou que nous soyons déjà en sa présence. » Agréables à Dieu ! c’est-à-dire au Dieu unique, auteur et créateur de toutes choses, du monde aussi bien que de ce qui est au-dessus de ce monde.

J’applaudis à ce mot d’Épicharme : « Si tu as été pieux du fond du cœur, tu ne souffriras aucun mal après la mort. Ton âme vivra éternellement là-haut. » Je n’applaudis pas moins à ces vers du lyrique : « Les âmes des impies sont emportées çà et là sous la terre par un tourbillon de sanglantes tortures, et elles sont comme assujetties à un joug inévitable de maux et de supplices. Les âmes pieuses, au contraire, habitent le ciel, et célèbrent par des hymnes d’allégresse le roi des bienheureux. » Qu’on ne vienne donc plus nous dire que l’âme est envoyée du ciel sur la terre, pour y subir une destinée indigne d’elle ; car Dieu fait tout pour le mieux. Mais l’âme qui a em-