Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 5.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
359
SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

débauche, etc. » Qui donc est désigné ici par la fleur des champs ? qui marche selon la chair ? quels sont les hommes charnels, selon l’expression de l’apôtre ? Ceux qui vivent dans le péché. En effet, que l’âme soit la partie la plus noble de l’homme, et le corps la partie inférieure, c’est un point avoué universellement. Mais ni l’âme n’est par sa nature un bien, ni le corps par sa nature un mal. De ce qu’une chose n’est pas un bien, il ne s’ensuit pas directement qu’elle soit un mal : il est une classe de choses qui tiennent le milieu entre le bien et le mal, et ce que l’on rejette ou ce que l’on approuve rentre dans cette catégorie. Il fallait donc que l’homme, dont l’organisation tombe sous les sens, fût composé de principes différents, mais non opposés, le corps et l’âme. Les bonnes actions, comme étant d’une nature meilleure, se rapportent donc toujours à ce principe supérieur, auquel a été donnée la domination ; les œuvres de la volupté et du péché découlent du principe inférieur, de l’esprit de péché. Mais l’âme du sage et du Gnostique, exilée un moment dans le corps, comme un voyageur en pays étranger, use du corps avec une austère tempérance, et se garde bien de montrer pour lui trop d’indulgence ou d’affection, disposée à quitter ce pavillon corruptible, aussitôt que l’ordre de son rappel lui sera signifié ; « Je suis une étrangère ici-bas, dit-elle avec Abraham, je suis une voyageuse parmi vous. »

Basilide a fondé sur ces paroles son dogme de l’élection privilégiée et d’une naissance supérieure à celle de ce monde. Dogme impie et menteur ! toutes les créatures sont l’ouvrage d’un seul et même Bien : personne qui, par sa nature, soif étranger dans ce monde, puisqu’il n’y a qu’une nature comme il n’y a qu’un Dieu. L’élu toutefois vit ici-bas comme un étranger, sachant qu’il faut tout posséder, mais tout abandonner ensuite ; il ne dédaigne pas de toucher aux trois sortes de biens que reconnaissent les Péripatéticiens : il y a mieux, il use du corps comme un voyageur qui, parti pour une contrée lointaine, entre dans les hôtelleries et dans les maisons qu’il rencontre sur sa route, prenant soin des choses de ce monde et du toit qui l’abrite ; mais laissant tout, demeure, possession, usage, sans leur