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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

nant nos fautes précédentes, nous marchons en ayant, éclairés dans notre intelligence et soulevant notre âme plongée dans la matière, pour la détacher des voluptés sensuelles et des péchés passés. S’il me fallait donner l’étymologie du mot science (en grec épistémê), je l’emprunterais au mot stasis, qui signifie station, repos, parce que la science arrête dans la réalité des choses notre esprit, tout à l’heure flottant et incertain. Le même mot a formé l’étymologie de la foi, (pistis) qui n’est que la station ou le repos de l’esprit dans ce qui est (peri to on stasis). Pour nous, Chrétiens nous aspirons à connaître celui qui est juste, toujours et en toutes choses, qui, pour demeurer éternellement juste, n’a pas besoin de craindre les supplices portés par la loi, de redouter la haine de ses contemporains et des vengeurs de la vertu, de trembler enfin devant le péril auquel l’ont exposé ses crimes et ses bassesses. S’abstenir de l’injustice par des motifs semblables, c’est être bon par crainte et non par choix. Épicure dit que « le sage, ou du moins celui qu’il regarde comme tel, ne voudrait jamais commettre une injustice, quelque profit qu’il dût lui en revenir ; car il ne peut avoir la certitude qu’elle restera toujours secrète. » Ainsi donc, ô Épicure, ton sage ferait le mal, si on pouvait lui garantir qu’il ne sera point découvert. Voilà de tes dogmes pleins de ténèbres ! Il y a plus ; si l’on se tient éloigné de l’injustice, dans l’espoir des récompenses que Dieu réserve aux bonnes actions, on n’est pas même, dans ces dispositions, bon de son propre mouvement. Dans le premier cas, c’est la crainte, dans le second, c’est la récompense qui donne la justice, je me trompe, une ombre de justice. Que l’espérance qui attend l’homme par de là le tombeau doive être bonne pour les gens de bien, et fatale pour les méchants, ceux qui ont embrassé la philosophie barbare ne sont pas les seuls à le savoir. Les Pythagoriciens professent le même dogme, puisqu’ils proposent l’espérance pour but à ceux qui s’adonnent à la philosophie. Socrate dit dans le Phédon, « que les âmes des hommes vertueux quittent ce monde avec l’espérance de la félicité. » Puis, blâmant les méchants, il dit par opposi-