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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

chose de beau et de glorieux, l’ardente impulsion de son âme l’y portera constamment et avec énergie ? Vous ne le verrez point aujourd’hui vertueux, demain criminel ou indifférent : sa marche est régulière et affermie dans le bien.

En outre, ce n’est ni pour la gloire, ni pour la bonne renommée, comme parlent les philosophes, ni en vue d’une récompense qu’il attend de Dieu ou des hommes, qu’il règle tout le cours de sa vie à l’image et à la ressemblance du Seigneur. Que si parfois, au bien que fait le gnostique, on répond par le contraire, oublieux des injures, il rejettera comme mauvaise toute pensée de rendre le mal pour le mal, au souvenir que Dieu se montre juste et bon pour les justes et pour les injustes. Le Seigneur dit à ceux qu’animent ces sentiments : « Soyez parfaits comme votre père céleste est parfait. » Le gnostique est mort dans sa chair ; il n’y a plus que lui qui vive. Ce sépulcre de lui-même, il en a fait un temple saint qu’il a consacré au Seigneur, en élevant à Dieu son âme, autrefois sujette au péché. On ne peut plus dire qu’il soit continent ; il est parvenu à une sorte d’impassibilité inaccessible aux passions humaines, et il attend que Dieu le revête de la forme divine.

« Lorsque vous faites l’aumône, dit le Seigneur, que personne n’en soit instruit, et quand vous jeûnez, parfumez-vous, afin que Dieu seul le sache. » Tous les hommes doivent ignorer le bien que l’on fait. Le miséricordieux lui-même ne doit pas savoir qu’il est miséricordieux ; autrement, il serait miséricordieux parfois et parfois il ne le serait pas. Mais quand ce sera par habitude et par manière d’être qu’il exercera la bienfaisance, il se rapprochera de la nature du bien. Cette disposition intérieure se transformera chez lui en nature et en pratique assidue. N’espérons pas toucher par un premier et sublime essor le but marqué ; il faut y arriver pas à pas, en parcourant toute la voie étroite. Ces mots : Être attiré par le Père, ne signifient pas autre chose que mériter de recevoir la vertu de la grâce qui vient de Dieu, afin d’avancer par elle sans obstacle dans la route difficile de la perfection.

S’il arrive que l’élu soit en butte à la haine de quelques