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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

de tout autre, est purifiée par le supplice qui lui est propre. Cet échafaudage tombe, quand on fait réflexion qu’il est en notre pouvoir de confesser le Christ, et de subir ou non le châtiment du martyre. Pour quiconque renie le Seigneur, la Providence de Basilide n’existe plus. Réponds-moi, Basilide ! voici un Chrétien qui a été arrêté. Est-ce par la volonté ou non de la Providence que ce captif rendra témoignage et sera puni ? S’il renie le Seigneur, il ne sera pas châtié. Que devient alors l’expiation ? Le confesseur descend-il dans l’arène pour rendre témoignage ? Il rendra témoignage malgré lui. Mais comment la gloire et les palmes de l’éternité peuvent-elles être la récompense d’un martyre, où le Seigneur a été confessé sans que la volonté y ait eu part ? Dira-t-on, au contraire, que la Providence n’a pas permis que Celui qui voulait pécher consommât la faute ? C’est lui imputer du même coup une double injustice ; d’abord, elle ne délivre pas l’infortuné que l’on traîne à la mort à cause de la justice, ensuite elle vient en aide à celui qui avait la volonté de prévariquer. Le premier agit d’après sa propre impulsion. Le second, enchaîné dans sa volonté perverse et injustement favorisé, ne peut en venir aux actes qu’il a résolus.

Disons-le sans hésiter, il est impie, le téméraire qui déifie Satan et ose transformer le Seigneur en homme pécheur. Lorsque le démon nous tente, sachant bien ce que nous sommes, mais ignorant si nous résisterons, avec le désir néanmoins de ruiner notre foi, il essaie de nous attirer à lui. Son pouvoir ne va pas plus loin. La Providence s’est proposé un triple but. Elle veut que nous nous sauvions par nos propres efforts, la loi étant là pour nous aider ; elle veut que le tentateur soit couvert de honte par l’échec qu’il reçoit ; elle veut enfin que la foi de ses serviteurs se fortifie par ces exemples, et que la lumière arrive dans la conscience des infidèles que l’héroïsme des martyrs a déjà frappés d’admiration.

Mais si le martyre est une rémunération, obtenue par le supplice, il en va de même de la foi et de la doctrine, causes du martyre. La foi et la doctrine sont donc les auxiliaires du supplice. Connaissez-vous assertion plus absurde ?