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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

qui meurt pour son propre salut souffre par amour pour le Seigneur. En effet, étant la vie lui-même, il a voulu souffrir à cause de nous, afin que sa passion fût notre vie. « Pourquoi m’appelez-vous, Seigneur ! Seigneur ! s’écrie-t-il, et ne faites-vous pas ce que je dis ? car le peuple qui chérit des lèvres seulement le Seigneur est un autre peuple, » et obéit à un autre docteur auquel il s’est volontairement vendu. Il n’en va pas de même de ceux qui gardent les préceptes du Sauveur. Ils lui rendent témoignage dans chacune de leurs actions ; dociles à sa volonté, autorisés par là même à l’appeler Seigneur, et attestant solennellement par leurs actions que celui auquel ils croient est bien le Dieu pour lequel ils ont crucifié leur chair, avec ses convoitises et ses mouvements déréglés. « Si nous vivons par l’esprit, dit l’apôtre, conduisons-nous aussi par l’esprit. Celui qui sème dans la chair ne recueillera de la chair que corruption, mais celui qui sème dans l’esprit recueillera de l’esprit la vie éternelle. » Confesser le nom du Christ au prix de son propre sang parait être une mort bien cruelle à quelques hommes dont il faut plaindre les pensées toutes terrestres. Ils ne savent pas que cette porte de la mort est l’entrée de la vie éternelle. Quelles seront après la mort les récompenses de ceux qui auront saintement vécu, quels seront les supplices de ceux qui auront vécu dans l’injustice et le désordre ? Ils se refusent à le comprendre, je ne dis pas seulement dans nos livres sacrés, où tous les préceptes parlent de ces châtiments et de ces récompenses, mais ils ferment même l’oreille aux instructions de leurs philosophes. Que dit la pythagoricienne Théano ? « La vie serait réellement un joyeux banquet pour les méchants qui meurent, chargés de crimes, si leur âme n’était pas immortelle ; la mort leur serait un gain. » Platon a écrit dans le Phédon : « Si la mort était la dissolution de tout l’homme, etc… » Il ne faut donc pas s’imaginer avec le Telèphe d’Eschyle « qu’il n’y a qu’une seule route pour descendre aux enfers ; » car de nombreux chemins nous y conduisent, de nombreux péchés nous y entraînent.

Voilà probablement les esprits inquiets et flottants que le comique Aristophane livre en ces termes à la risée publique :