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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

lument au devant du bourreau, et manifestent, par haine contre le Créateur, les malheureux ! une brutale impatience de mourir. Voilà, nous le proclamons, les homicides d’eux-mêmes : leur trépas n’est pas un martyre, quoique leur supplice soit ordonné par l’État. Ils ne possèdent point le sceau du martyre selon la foi, puisque, ignorants du vrai Dieu, ils se livrent d’eux-mêmes à une mort stérile, pareils aux Gymnosophistes indiens qui se précipitent follement dans les flammes. Mais, à ces faux Gnostiques dont l’impiété se déchaîne contre le corps, apprenons-leur que l’harmonie et la santé de nos organes contribuent à développer les heureuses dispositions de notre esprit. Voilà pourquoi Platon, dont les hérétiques invoquent à grands cris le témoignage, de préférence à tout autre, parce qu’ils le croient l’ennemi de la génération, écrit dans son troisième livre de la République : « Pour établir l’harmonie entre le corps et l’âme il faut prendre soin du corps par lequel doit vivre et vivre honnêtement le héraut public de la vérité. » C’est qu’en effet nous n’arrivons au sommet de la connaissance que par le chemin de la vie et de la santé. L’homme ne pouvant s’élever à cette hauteur sans posséder ces éléments indispensables, ni exécuter autrement que par eux tout ce qui l’achemine vers la connaissance, comment n’applaudirait-il pas au bien-être ? C’est donc par le moyen de la vie que nous nous établissons dans le bien-être de la vie ; et qu’après nous être exercés par le corps à ce bien-être, nous passons à l’état d’immortalité.

CHAPITRE V.
Du mépris de la douleur, de la pauvreté, et des autres maux qui concernent le corps.

Les Stoïciens professent aussi des maximes étranges. À les entendre, l’âme n’est assujettie en rien aux affections corporelles ; les maladies ne la disposent pas plus au vice, que la santé à la vertu ; ces deux états sont indifférents. Mais Job, par l’éclat de sa foi et sa fermeté d’âme, précipité de la richesse dans l’indigence, de l’illustration dans l’obscurité, de la beauté dans