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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

repousser la vérité, creuse sous les pas de l’homme un abîme où il tombe. Il en va de même de la continence et de l’incontinence. L’une est une œuvre de vie, l’autre une œuvre de mort ; s’abstenir de toute injustice est le commencement du salut. Aussi le sabbat me semble-t-il, en recommandant l’abstinence de tout mal, désigner indirectement la continence. Sinon, en quoi l’homme serait-il différent de la brute ; et d’autre part, en quoi les anges de Dieu seraient-ils plus sages que l’homme ? « Vous l’avez, pour un peu de temps, placé au-dessous des anges, » s’écrie le roi prophète. Personne, en effet, n’applique au Seigneur ce passage, bien que le Seigneur aussi ait revêtu la chair, mais au parfait gnostique, abaissé au-dessous des anges, du côté de cette vie qui passe et par son enveloppe terrestre. La sagesse, à mon avis, n’est donc pas autre chose que la science, puisque la vie ne diffère pas de la vie. En effet, pour la nature humaine, c’est-à-dire pour l’homme, et pour tous les êtres qui, avec lui, ont été élevés jusqu’à l’immortalité, vivre, c’est contempler et s’abstenir, quoique l’un soit supérieur à l’autre. Telle est la haute signification que je donne aux paroles de Pythagore, quand il dit : « Dieu seul est sage. » L’apôtre aussi, dans une épître aux Romains, écrit ces mots : « Mystère découvert à tous les peuples, afin qu’ils obéissent à la foi, et connu de Dieu, seul sage, par Jésus-Christ. » C’est à cause de l’amour qui l’unissait à Dieu que Paul se nommait philosophe. « Aussi Dieu parlait-il à Moïse, comme un ami parle à son ami, » dit l’Écriture. Le vrai, que Dieu contemple sans ombres, engendre aussitôt la vérité, et le gnostique est l’ami de la vérité. « Va trouver la fourmi, ô paresseux, et fais-toi l’élève de l’abeille. » Si chaque nature a ses fonctions spéciales ; s’il en va ainsi du bœuf, du cheval, du chien, quelle tâche particulière assignerons-nous à l’homme ? L’homme, selon moi, c’est le centaure fabuleux de la Thessalie, composé d’un élément animal et d’un principe raisonnable, je veux dire d’une âme et d’un corps. Le corps s’occupe des choses d’ici-bas et se courbe vers la terre. L’âme s’élance jusqu’à Dieu ; éclairée par la philosophie véritable, travaillant de