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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

« Tu ne désireras pas, » révèlent que c’est un même Dieu que proclament la loi, les prophètes et l’Évangile ; car il est écrit : « Tu ne désireras point la femme de ton prochain. » Or, le prochain du juif n’est pas le juif ; il est son frère et il a reçu le même esprit. Il faut donc entendre par prochain tout homme d’une autre nation. Comment, en effet, ne serait-il pas notre prochain, celui qui peut participer au même esprit. Abraham n’est pas seulement le père des Hébreux, il l’est encore des Gentils. Mais, si la loi punit de mort la femme adultère et son complice, il est évident que le commandement ainsi conçu : « Tu ne désireras point la femme de ton prochain, » concerne les Gentils ; afin que celui qui, selon la loi, se sera abstenu et de sa sœur et de la femme de son prochain, entende publiquement ces paroles du Seigneur : « Et moi je dis : Tu ne désireras pas. » L’addition de ce pronom moi, montre que le commandement est encore plus formel. Mais ce qui prouve que Carpocrate et Épiphane sont en guerre avec Dieu, c’est le passage suivant, que l’on trouve dans le célèbre ouvrage ayant pour titre De la justice. « En conséquence, y est-il dit en propres termes, il faut regarder comme ridicule cette parole sortie de la bouche du législateur : Tu ne désireras pas, jusqu’à cette autre plus ridicule encore : le bien de ton prochain. En effet, c’est lui qui nous a donné le désir, comme contenant le principe de la génération, et maintenant il nous ordonne de le réprimer, lorsqu’il en est autrement chez tous les animaux. Et ces mots : la femme de ton prochain, par lesquels il soumet la communauté à la propriété particulière, ne sont-ils pas encore plus ridicules ? » Voilà donc les admirables dogmes des Carpocratiens ! On dit que ces malheureux et plusieurs autres partisans des mêmes perversités, après s’être réunis hommes et femmes pour un repas, (car je n’appellerai pas agape leur assemblée), après s’être gorgés de mets qui excitent aux plaisirs de la chair, et avoir renversé les flambeaux dont leur justice, je me trompe, dont leur prostitution, ne peut supporter la lumière, s’accouplent pêle-mêle comme ils veulent et avec qui ils veulent. On dit aussi qu’après avoir