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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

sans cesse l’immortalité du genre humain ; par lui se prolonge dans l’éternité une chaîne perpétuelle de générations qui, de main en main, se transmettent la vie comme on se passe un flambeau. Mais Démocrite repousse le mariage et les enfants à cause des mille encombres de la paternité, et parce qu’elle détourne de fonctions beaucoup plus nécessaires. Épicure est du même sentiment, et avec lui tous ceux qui placent le bien dans la volupté et dans un calme que ne troublent ni les soucis ni la douleur. Selon les Stoïciens, le mariage et les enfants sont choses indifférentes ; selon les Péripatéticiens, ils sont un bien. Bref, ces philosophes, dont la doctrine n’allait pas plus loin que de vaines paroles, se firent esclaves des voluptés. Les uns eurent des concubines, les autres se livrèrent aux courtisanes, la plupart se souillèrent avec de jeunes garçons. Ces quatre ordres de philosophes, en se prostituant dans les jardins avec des femmes sans pudeur, honoraient par des actes la volupté. La malédiction, qui est portée par la loi sur l’attelage du bœuf et de l’âne, atteindra inévitablement ces hommes qui, tout en s’abstenant eux-mêmes de certaines choses qu’ils regardent comme nuisibles, les recommandent pourtant aux autres, et réciproquement. L’Écriture nous le déclara en peu de mots : « Prends garde de faire à un autre ce que tu serais fâché qu’on te fît. » Ceux qui approuvent le mariage disent : La nature nous a faits propres au mariage, comme le montre évidemment la distinction des sexes ; et ils répètent continuellement : « Croissez et multipliez-vous. » Quoiqu’il en soit, il leur paraît honteux à eux-mêmes que l’homme, ouvrage de Dieu, soit plus intempérant que les animaux privés de raison, qui ne s’accouplent pas au hasard et avec plusieurs femelles, mais avec une seule et d’une même espèce. Tels sont les pigeons noirs, les colombes, les tourterelles et les autres oiseaux semblables. Ils disent encore : « Celui qui n’a pas d’enfants s’éloigne de la perfection selon la nature ; car, il n’a pas de successeur de son sang à mettre en sa place. Or, celui-là est parfait, qui a tiré de lui-même un être semblable à lui, ou plutôt il le sera, lorsqu’il aura vu son fils faire de même ;