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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

dre, Anthia, Ériphyle, qui vendit à prix d’or un mari qu’elle chérissait auparavant. La même passion a fait dire sur l’autre scène au comique Thrasonide : « Une petite fille de rien m’a entièrement subjugué. »

Si le malheur est une méprise de notre raison, si le péché volontaire constitue l’injustice, si l’injustice volontaire constitue la perversité, mon péché est donc un acte libre de ma volonté. C’est pour cela qu’il est écrit : « Le péché n’aura plus d’empire sur vous, parce que vous n’êtes plus sous la loi, mais sous la grâce ; » et que l’apôtre dit à ceux qui avaient eu foi : « Nous avons été guéris par ses meurtrissures. » Le malheur est un acte involontaire de quelqu’un envers moi ; mais l’injustice seule est volontaire, qu’elle vienne de moi ou d’autrui. Le psalmiste nous donne à entendre ces différences entre les péchés, lorsqu’il proclame heureux celui dont Dieu a effacé les iniquités et couvert les péchés, celui auquel ses autres fautes n’ont pas été imputées, et qui a été absous du reste : « Heureux celui à qui son iniquité a été pardonnée, et dont le péché a été couvert ; heureux l’homme à qui Dieu n’a point imputé son crime, et qui ne recèle point la fraude dans son âme ! » Cette grâce descend sur les élus de Dieu par l’entremise de Jésus-Christ notre Seigneur ; car la charité couvre la multitude des péchés. Celui qui les efface c’est le même Dieu « qui ne veut point la mort de l’impie, mais que l’impie se convertisse. » Les actes ne nous sont pas imputés, qui ne procèdent pas de notre volonté libre ; car, « quiconque aura regardé une femme par convoitise, dit le Seigneur, a déjà commis l’adultère. » Et le Verbe qui éclaire remet les péchés. « Et en ce temps-là, dit le Seigneur, on cherchera l’iniquité d’Israël, et elle ne sera plus ; le péché de Juda, et il ne sera pas trouvé. En effet, qui sera comme moi ? qui se tiendra devant ma face ? » Vous le voyez, il n’est proclamé qu’un seul et même Dieu bon, un Dieu qui rétribue selon les mérites, et qui remet les péchés. Saint Jean aussi paraît, dans la plus longue de ses épîtres, avoir enseigné qu’il existe des différences entre les péchés. « Si quelqu’un, dit-il, a vu son frère commettre un péché qui ne va point à