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fort peu d’accord avec eux-mêmes, sont tous ramenés à reconnaître l’unité d’une Providence.

Cléante, parlant de Dieu, en fait tantôt un esprit, tantôt l’âme, tantôt l’air, quelquefois la raison elle-même. Zénon, son maître, veut que la loi naturelle et divine, ou l’éther, ou bien la raison, soient le principe de tout ; et quand il dit que Junon est l’air, Jupiter le ciel, Neptune la mer, Vulcain le feu, et qu’il fait voir aussi des dieux dans les autres éléments, il réfute et confond victorieusement l’erreur publique de l’idolâtrie. Chrysippe dit presque la même chose. Il considère Dieu comme une force divine, une nature rationnelle, le monde lui-même, ou l’inévitable destin. Il imite Zénon dans ses interprétations physiologiques des fables d’Hésiode, d’Homère, d’Orphée. Vous trouvez dans Diogène de Babylone le même système pour expliquer l’enfantement de Jupiter, la naissance de Minerve et les autres événements de cette nature, dont il fait des noms de choses plutôt que des divinités. Xénophon déclare qu’on ne peut savoir la manière d’être du vrai Dieu, qu’il ne faut donc pas chercher à la connaître. Ariston de Chios enseigne qu’elle est incompréhensible. Tous deux ont eu le sentiment de la majesté divine, par là même qu’ils ont désespéré de la comprendre. Le langage de Platon sur Dieu, pour la pensée comme pour l’expression, est plus clair et plus positif. Il serait vraiment divin, si le mélange de quelques idées politiques ne venait l’affaiblir. Aux yeux de Platon, dans le Timée, Dieu, par son nom même, est le père du monde, le créateur de l’âme, l’architecte du ciel et de la terre. Il apprend avant tout que, s’il est difficile de le connaître à cause de son incroyable et infinie puissance, il est impossible d’en parler publiquement lorsqu’on l’a connu. Ce langage est presque le nôtre. Nous reconnaissons un seul Dieu, nous disons qu’il est l’auteur de toutes choses, et nous n’en parlons jamais en public, à moins qu’on ne nous interroge.

XX. Je viens de passer en revue les opinions de presque tous les philosophes, dont le plus beau titre de gloire est d’avoir, sous des noms divers, reconnu un seul Dieu ; d’où il résulte,