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ternité ; qu’avant ce monde, il était un monde à lui-même ; qu’il commande à tout par sa parole, qu’il règle tout par sa sagesse, qu’il accomplit tout par sa puissance ? On ne peut le voir, il est trop éclatant pour nos yeux ; ni le saisir, il est trop pur pour nos mains ; ni se le figurer, il est trop au-dessus de nos sens. Immense, infini, lui seul connaît tout ce qu’il est. Notre esprit est trop étroit pour le concevoir. Nous exprimons l’idée la plus digne de lui, lorsque nous le proclamons au-dessus de toute expression. Dirai-je ce que je pense ? Prétendre connaître la grandeur de Dieu, c’est la diminuer ; croire ne pas la diminuer, ce n’est point la connaître. Ne cherchez pas un nom à Dieu, Dieu est son nom. Les noms sont nécessaires, quand il existe une multitude d’êtres qu’il faut distinguer les uns des autres par des signes particuliers. Mais Dieu est seul ; ce seul mot, Dieu, embrasse tout. Si je l’appelais père, vous le croiriez terrestre ; roi, vous le soupçonneriez charnel ; seigneur, vous le supposeriez mortel ; écartez de lui ces noms d’emprunt et surajoutés, et vous entrevoyez l’éclat de sa lumière. Que dirai-je ? J’ai pour moi le consentement de tous les hommes. Le peuple, quand il tend les mains vers le ciel, ne prononce que le mot Dieu. J’entends dire partout : Dieu est grand, Dieu est vrai, plaise à Dieu ! Ce langage que la nature apprend au vulgaire, n’est-ce pas celui du chrétien, professant sa foi ? Ceux qui veulent un Jupiter souverain ne se trompent que de nom ; il sont d’accord avec nous sur l’unité de puissance.

XIX. Mais j’entends aussi les poètes qui célèbrent un seul père des dieux et des hommes, et répètent que l’âme est telle que l’a faite ce Dieu, principe de toutes choses. Que dit Virgile, le poète de Mantoue ? Quoi de plus clair, de plus vrai, ou du moins de plus près de la vérité que ces paroles : « Dès le commencement, dit-il, un souffle divin entretient la vie du ciel, de la terre, et de toutes les autres parties du monde. Cette âme répandue partout fait tout mouvoir. De là les hommes, les animaux et toutes les bêtes. » Et ailleurs, il appelle Dieu, cette âme, ce souffle. Voici ses paroles : « Dieu, dit-il, pénètre partout, au sein de la terre, des mers, dans