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ni doute ni incertitude sur le reste. Comme ce cher frère n’a pu contenir la peine, le dépit, la douleur, l’indignation qu’il éprouvait en voyant des gens pauvres, grossiers, ignorants, discourir des choses du ciel, je veux qu’il sache que tous les hommes, sans distinction d’âge, de sexe, de rang, sont nés avec l’usage de la raison et de l’intelligence ; qu’ils tiennent cette aptitude, non du hasard, mais de la nature ; que les philosophes eux-mêmes et les hommes célèbres par la découverte des sciences et des arts, ont aussi passé pour des êtres vils, méprisables, ignorants, avant que leur génie eût livré un nom glorieux à la renommée ; que nous n’avons rien reçu des riches, esclaves de leurs biens et plus accoutumés à regarder l’or que le ciel ; que ce sont ces pauvres qu’on méprise qui ont découvert la sagesse et transmis la science de siècle en siècle. Le génie ne s’achète pas, il ne s’acquiert pas même par l’étude, il tient à l’âme, il naît avec elle. Il ne faut donc pas voir avec dépit, avec indignation qu’un homme, quel qu’il soit, ait son opinion, la développe, raisonne sur les choses divines. Ce n’est point l’autorité de celui qui discute, mais la vérité, objet de la discussion, qu’il faut examiner avant tout. Plus le langage est simple, plus la vérité est lumineuse. La pompe et les grâces du style sont un fard trompeur qui la déguise. C’est par elle même qu’elle se soutient comme l’unique base de l’équité.

XVII. Je ne rejette pas le principe que Cécilius, avant tout, s’est efforcé d’établir ; c’est-à-dire que l’homme doit se connaître, s’étudier lui-même, examiner ce qu’il est, d’où il vient, pourquoi il existe ; s’il est un composé d’éléments ou un ingénieux mélange d’atômes, ou plutôt si c’est Dieu qui l’a créé, formé, animé ; voilà le terme inconnu du problème que nous ne pouvons atteindre et bien dégager, sans avoir sérieusement examiné l’ensemble. Car dans l’univers, tout se tient, tout se lie, tout s’enchaîne, et l’on n’entend rien à la nature humaine si l’on n’a point cherché à se rendre compte de la nature divine, comme on ne peut réussir à poser les lois d’un état particulier si on ne connaît bien les lois qui régissent la grande société humaine, le monde entier. Ce qui nous distingue sur-