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des choses, ils admettent sans choix tout ce qu’on leur dit, et arrivent à confondre le faux avec le vrai, d’autant plus aisément qu’ils ne savent pas que le vraisemblable couvre souvent le mensonge, et que ce qui paraît à peine croyable recèle la vérité. Plus ils croient facilement ce qu’on leur dit, plus ils rencontrent de gens habiles qui leur font croire tout ce qu’ils veulent. Toujours dupes de leur imprudence, au lieu de s’en prendre à la faiblesse de leur jugement, ils se plaignent que tout est incertain ; et par une erreur qui tient toujours au même fond de faiblesse, ils finissent par tout condamner ; ils préfèrent ne se prononcer sur rien et rester dans un doute universel plutôt que de prendre parti dans des questions qui les trompent toujours. Gardons-nous bien de poursuivre de cette haine tout raisonnement. Elle va jusqu’à faire concevoir aux plus simples, je ne sais quel mépris, quelle aversion pour tous les hommes ; leur imprudente crédulité les expose à être trompés par des personnes qui leur semblaient de bonne foi ; une erreur entièrement semblable leur rend toutes les autres suspectes, et la crainte que leur inspirent les hommes pervers, ils l’éprouvent à l’égard de ceux qu’ils avaient jugés les plus vertueux.

C’est pourquoi nous sommes souvent assez embarrassés. Toute question à examiner se présente sous deux faces : d’un côté se trouve la vérité, mais obscure ; de l’autre, une merveilleuse subtilité qui, par l’abondance des paroles, fait l’illusion d’une démonstration solide et convaincante. Il nous faut donc ici tout peser, et avec toute la maturité possible, de manière à faire au talent sa part d’éloge, et à démêler la vérité pour l’approuver et l’adopter.

— XV. Vous manquez, reprit Cécilius, aux devoirs d’un juge impartial ; vous ne devez point, par un préambule de cette nature, affaiblir la force de mon discours ; d’autant plus qu’il ne touche pas Octave, puisqu’il n’a pas encore parlé et qu’il lui trace sa ligne pour me réfuter, si toutefois il le peut.

— Si je ne me trompe, lui répondis-je, c’est dans l’intérêt de tous deux que je me suis permis ces réflexions générales, sur