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l’ignorance des arts, si ce n’est des plus abjects, prononcer sur le principe des choses, sur la nature humaine, pendant que la philosophie qui possède un si grand nombre d’écoles, est encore à délibérer depuis tant de siècles sur ces graves questions. Et ce n’est pas sans raison : il y a si loin de la faiblesse de l’homme à la connaissance de Dieu ! Aussi ce qui demeure suspendu au-dessus de nos têtes dans les cieux, ce qui est enseveli sous nos pieds dans les abîmes de la terre, est un secret impénétrable pour nous. Il ne nous est pas donné de le savoir, et il serait même impie de vouloir le sonder. Nous serions assez heureux, assez sages, si nous savions, selon les maximes d’un ancien philosophe, nous connaître davantage nous-mêmes ; mais si, nous livrant à un vain travail, à des recherches insensées, nous voulons franchir les limites imposées à notre faiblesse ; si, jetés sur la terre, nous allons, dans les transports d’une ambitieuse audace, nous élancer par de-là les cieux, du moins ne nous forgeons pas de vains fantômes, ne mêlons pas à ce premier égarement des terreurs imaginaires. Qu’il y ait eu, dans le principe, des éléments générateurs rassemblés au sein de la nature, faut-il pour cela un Dieu créateur ? Que les diverses parties de cet univers aient été formées, arrangées, réunies par un concours fortuit, est-il besoin d’un Dieu qui en soit l’architecte ? Que le feu ait allumé les astres, que le ciel se soit déployé de lui-même, que la terre se soit affermie par son poids, que les eaux, par leur pente naturelle, aient pris leur cours vers la mer, quel rapport dans tout cela avec votre religion nouvelle, cet épouvantail qui n’est après tout qu’une superstition ?

L’homme, la brute, tout ce qui naît, vit et respire, est un assemblage spontané des éléments, et se résout, se décompose en ces mêmes éléments, puis s’évanouit. Ainsi, tout reflue à sa source, tout revient à son principe, sans ouvrier, sans juge, sans créateur. Ainsi, des semences ignées qui se réunissent naissent sans cesse de nouveaux soleils. Ainsi, les vapeurs exhalées de la terre forment les brouillards ; ou bien elles s’assemblent et s’épaississent, et de là les nuages qui