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reprit-il, est un aiguillon qui me pique et m’importune ; accuser mon ami de négligence à mon égard, c’est faire plus adroitement retomber sur moi, quoique d’une manière indirecte, le blâme d’ignorance.

Je n’en resterai pas là, je demande raison à Octave de toute cette affaire. S’il veut qu’un homme de la secte qu’il attaque soutienne la lutte avec lui, il verra qu’il est plus facile de disputer entre amis que de combattre en vrais philosophes. Allons nous asseoir sur le môle qui protège les bains contre les flots, sur ces rochers qui s’avancent dans la mer ; nous pourrons nous délasser de la fatigue et discuter plus à notre aise. On s’assied ainsi qu’il l’avait proposé, mais de manière que j’occupais le milieu, car ils s’étaient placés à mes côtés, non par respect, par déférence ou cérémonie (car toujours l’amitié nous trouve ou nous rend égaux) mais me prenant pour arbitre, ils avaient voulu que je fusse plus près d’eux pour mieux les entendre et séparer les deux antagonistes.

Alors Cécilius commença en ces termes :

Mon cher Minucius, bien qu’il ne vous reste plus aucun doute sur l’affaire qui nous divise, puisqu’après avoir examiné avec soin les deux systèmes, vous avez condamné l’un pour suivre l’autre, il vous faut cependant apporter ici un esprit impartial, tenir la balance d’un juge plein d’équité, et ne pas suivre la pente qui vous entraînerait plus d’un côté que d’un autre, de peur que votre jugement ne parût moins le résultat de nos raisons que l’expression de vos propres sentiments. Si vous voulez siéger ici comme un homme entièrement neuf, qui ne sait rien des deux partis, il me sera facile de vous prouver qu’ici-bas tout est incertain, douteux, problématique, vraisemblable plutôt que vrai.

C’est pourquoi il est moins étonnant de trouver des hommes qui, découragés dans la recherche de la vérité, cèdent sans examen à la première opinion qui se présente. Il serait plus extraordinaire d’en rencontrer qui persévèrent dans leurs recherches avec un zèle opiniâtre. Mais ne doit-on pas gémir et s’indigner de voir des gens sans études, sans lettres, dans