Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 4.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
lv
DE LA TRADITION.

pas parler ? Par une providence très-sage, il a voulu que ses leçons divines fussent sans fard, afin que tous entendissent ce qu’il disait à tous. » Par ce passage, les Protestants triomphent. Mais la simplicité du style de l’Écriture met-elle les vérités qu’elle enseigne à la portée de l’intelligence de tout le monde ? Si cela était, pourquoi tant de disputes sur les présages mêmes qui paraissent les plus clairs ? Pourquoi tant de commentaires, de notes, d’explications chez les Protestants mêmes ? Le seul premier verset de la Genèse a donné lieu à des volumes entiers, et le sens en est encore contesté aujourd’hui par les Sociniens. Ces courtes paroles de Jésus-Christ : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang, » sont entendues par les Protestants dans trois sens différents.

Lactance n’avait à justifier que la simplicité du style de l’Écriture, il n’est point entré dans la question de savoir si tout le monde pouvait entendre l’hébreu, s’assurer de la fidélité des versions, saisir le vrai sens de tous les passages essentiels sans danger de se tromper. Vainement on nous répétera ses paroles : « Dieu ne peut-il donc pas parler ? » Il le peut sans doute, puisqu’il l’a fait ; mais encore une fois il n’a changé ni la nature du langage humain, ni la bizarrerie de l’esprit des hommes ; il a parlé aux uns en hébreu, aux autres en grec ; donc il a voulu qu’il y eût des interprètes pour les peuples qui n’entendent ni l’un ni l’autre. Le seul interprète infaillible est l’Église, tout autre est suspect et sujet à l’erreur.

Basnage observe que les Pères se servaient contre les hérétiques de l’argument négatif, et leur opposaient le silence de l’Écriture dans les disputes ; mais que ceux-ci le rétorquaient aussi contre les Pères. Il établit neuf ou dix règles pour dis-