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des autres. Le maître et le disciple, dans ce prédicament logique, sont réciproquement l’un à l’autre une cause de progrès. Il arrive quelquefois que les causes sont réciproquement entre elles cause des mêmes choses ; par exemple, lorsque le marchand et le cabaretier sont l’un pour l’autre une cause de gain mutuel. D’autres fois, les causes réagissent l’une sur l’autre, à des titres différents. Telles sont l’épée et la chair : l’épée agit sur la chair pour que celle-ci soit coupée ; la chair sur l’épée, pour que celle-ci coupe. — Il a été dit avec raison : œil pour œil, vie pour vie. En effet, l’agresseur qui a porté à la victime le coup mortel est pour la victime, cause direct de la mort, ou du moins cause que la mort s’en suivra. Mais l’agresseur, blessé à son tour mortellement par sa victime, l’a eu pour cause réciproque, mais d’une façon opposée et à un titre différent. Il a été pour lui une cause de mort. Ce n’est pas la mort qui lui a porté réciproquement le coup mortel ; il est parti du blessé. Il a donc agi sur un autre comme cause ; mais un autre est devenu cause pour lui. L’agresseur est cause par rapport à celui auquel il a causé dommage. La loi, au contraire, qui condamne le malfaiteur au supplice, n’est pas la cause de la violence ou du crime ; elle apporte à l’un justice et vengeance ; à l’autre correction et enseignement. Par conséquent, les causes ne s’engendrent pas mutuellement, elles restent à l’état de simples causes.

On demande en outre si des forces réunies deviennent les causes multiples d’un seul effet. Des hommes qui tirent d’un effort commun sur un navire sont cause, en effet, que le navire avance. Cela est vrai ; mais ils sont cause avec d’autres, à moins que la cause coopérante ne soit la même chose que la cause. Selon l’opinion de quelques autres, quoiqu’il y ait des causes nombreuses, une seule cause est séparément la cause d’un effet unique. Ainsi, par exemple, les vertus qui sont en grand nombre produisent le bonheur qui est unique. Il en va de même de la chaleur et de la souffrance. Bien des causes les produisent. Mais quoi donc ? la variété des vertus, tout ce qui échauffe, tout ce qui produit la douleur, a-t-il une vertu uni-