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prendre la fuite, il ne demande point qu’on l’épargne : « Saisissez-vous de moi, s’écrie-t-il, c’est pour cela que je suis venu ; conduisez-moi à votre chef. » Ce chef l’attendait tout armé ; mais il n’eut pas plutôt reconnu saint Jean qui s’approchait, que la honte le mit en fuite. Cependant saint Jean, oubliant son grand âge, le poursuivait de toutes ses forces et s’écriait en le poursuivait : « Mon fils, pourquoi fuyez-vous votre père vieux et désarmé ? Ayez pitié de moi, mon fils ne craignez point ; ni votre salut ni votre vie ne sont encore désespérés. Je paierai votre rançon au Christ. Je donnerai ma vie pour la vôtre comme Jésus-Christ a donné la sienne pour tous les hommes. Arrêtez-vous seulement, et croyez. Je suis envoyé par le Christ. » Le jeune homme s’arrête enfin ; il s’arrête, le visage baissé vers la terre, et, jetant ses armes loin de lui, tremblant de tous ses membres, pleure amèrement. Il embrasse le vieillard qui vient de le joindre, il expie, autant qu’il le peut, ses crimes par ses sanglots et ses gémissements ; il les lave dans l’eau de ses larmes comme dans les eaux d’un second baptême ; seulement il cache encore sa main droite. Alors l’apôtre, l’assurant et lui protestant que le Sauveur le reçoit en grâce, le prie lui-même et se jette à ses pieds ; il cherche sa main, toute rouge encore du sang qu’elle a versé tant de fois, il la cherche, il la prend, il la baise comme déjà blanchie et purifiée par la pénitence, et ramène enfin un fils à l’Église. Là, par des prières ardentes et continuelles, par des jeûnes austères qu’il partage tous avec le coupable, combattant le courroux de Dieu et implorant sa miséricorde, il rassure cette âme effrayée, il la persuade, il la console par mille discours tendres et touchants, et ne la laisse point qu’il ne l’ait réconciliée avec elle-même, rendue à Dieu et à l’Église, pleine de force et de confiance. Grand exemple d’une pénitence sincère, admirable enseignement pour les générations à venir, trophée acquis au mystère de la résurrection future lorsqu’à la consommation des siècles, les anges porteront sur leurs ailes dans les habitations célestes ceux qui se seront repentis sincèrement pendant leur vie. Quel spectacle alors s’offrira à tous les regards ! D’un côté, les