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naît du fond même de notre âme. Elle se sert, pour nous combattre, de nos propres désirs, de notre penchant à la volupté. Elle nous remplit de coupables espérances, de songes vains, de folles chimères. Elle allume en nous des cupidités honteuses et des amours qui nous rendent semblables aux bêtes. Notre âme, ainsi tourmentée, devient furieuse et haletante ; ses sentiments, ses affections, sont autant d’aiguillons et de pointes de fer qui la déchirent et l’ensanglantent. Quelle persécution plus cruelle que celle qui, naissant dans notre âme, nous est toujours présente et inévitable. Quel plus terrible ennemi, que celui que nous portons sans cesse et en tout lieu avec nous ! La persécution vient-elle du dehors, elle nous éprouve par les feux de la tentation ; vient-elle du dedans, elle nous tue. La guerre que le hasard ou une cause étrangère allument contre nous, s’éteint facilement. La guerre que nous livrent nos passions ne s’éteint qu’avec notre vie. Sentez-vous que cette persécution intérieure s’allume en vous à cause des richesses, des frères ou des amis que vous possédez, abandonnez cette possession funeste qui vous entraîne au mal, défaites-vous d’une maladie dangereuse, donnez-vous la paix à vous-même, et, vous tournant tout entier vers l’Évangile, choisissez le Sauveur pour guide, confiez-lui le soin de votre âme, il la conduira, la consolera, la fera jouir d’une éternelle vie. Ce qui est visible passe, ce qui est invisible ne passera point. La vie de ce monde est passagère et ne s’appuie sur rien de solide, la vie future est éternelle.

« Les premiers seront les derniers, et les derniers, les premiers. » Ces paroles renferment un sens profond qui exigerait, pour être compris, de longues et de sérieuses explications. Toutefois elles ne sont pas nécessaires à mon sujet ; car ce passage ne s’adresse pas seulement aux riches, mais à tous les fidèles. Mes recherches n’iront donc pas plus avant, persuadé que je suis d’avoir prouvé d’une manière satisfaisante que le Sauveur ne condamne point les richesses et n’exclut pas de son héritage ceux qui les possèdent, pourvu qu’attentifs à observer tous ses préceptes, préférant la vie aux choses de la terre, les yeux fixés sur lui comme sur un sage pilote dans une navi-