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qui tombe sous nos sens, rien de ce que d’autres ont fait avant lui. Ses paroles renferment quelque chose de plus grand, de plus divin, de plus parfait. Dépouillez-vous de vos vices, arrachez-les de votre âme, détruisez-les, rejetez-les loin de vous ; tel est son commandement et sa doctrine, bien dignes des fidèles et de lui-même ! Les anciens, méprisant les choses extérieures, se dépouillèrent volontairement de leurs richesses et de leurs biens ; mais leurs vices et les troubles de leur esprit s’accrurent de ce sacrifice. Ils en devinrent plus orgueilleux, et regardèrent avec mépris le reste des hommes, comme s’ils eussent fait quelque chose bien au-dessus des forces de l’humanité. Comment donc le Sauveur, qui veut notre salut, et nous le promet, nous ferait-il un ordre exprès d’un sacrifice qui pourrait nous le faire perdre ? Ne pouvons-nous pas brûler encore de l’amour et de la soif des richesses, après nous être dépouillés de celles que nous possédions ? Accablés sous le poids d’une indigence à laquelle nous n’étions pas accoutumés, ne pouvons-nous pas regretter amèrement les services qu’elles nous rendaient, et nous repentir d’en avoir fait un sacrifice inconsidéré ? Il est impossible, en effet, que cette nouvelle nécessité de nous procurer chaque jour, et à chaque instant, les choses nécessaires à notre vie, ne brise pas les forces de notre âme et ne la détourne pas des soins bien préférables du salut.

Combien plus il est avantageux de posséder des richesses médiocres qui nous donnent la faculté de pourvoir à nos besoins, et de secourir parmi nos frères ceux qui méritent d’être secourus ! Quelle société, quel commerce pourrait exister entre les hommes, si personne ne possédait rien ? Cette maxime d’ailleurs ne serait-elle pas en contradiction manifeste avec mille autres qu’il a également prononcées lui-même ? « Employez les richesses injustes à vous faire des amis, afin que, quand vous viendrez à défaillir, ils vous reçoivent dans les demeures éternelles. Amassez des trésors dans le ciel, où ni la rouille ni les vers ne dévorent et où les voleurs ne fouillent, ni ne dérobent. » Comment nourrir celui qui a faim, désaltérer celui qui a soif, couvrir celui qui est nu, ouvrir no-