Page:Genoude - Les Pères de l'Eglise, vol. 4.djvu/351

Cette page n’a pas encore été corrigée

soins. L’Écriture-Sainte dit quelque part admirablement, dirigeant ses paroles vers ceux qui sont pleins d’orgueil et de complaisance pour eux-mêmes : « Où sont les princes des nations qui dominaient les animaux de la terre ; qui se jouaient des oiseaux du ciel ; qui amassaient l’or et l’argent ; en qui les hommes se confient et qu’ils recherchent sans relâche, et ceux qui travaillent l’argent avec art, et qui en faisaient les plus beaux ouvrages ? Ils ont été exterminés, ils sont descendus dans les enfers. » L’enfer est le prix de l’orgueil.

Lorsque nous avons besoin de quelque outil pour cultiver nos champs, soit bèche soit charrue ou faucille, nous ne les faisons point fabriquer d’or et d’argent ; nous ne regardons point à la richesse, mais au travail auquel ils sont propres. Qui donc empêche que nous pensions de même par rapport aux différents meubles destinés à nos usages domestiques ? Pensez-vous, je vous prie, qu’un couteau de table ne coupe point s’il n’est garni de clous d’argent ou que le manche n’en soit d’ivoire ? Faut-il aller chercher jusqu’aux Indes du fer pour couper notre viande ? L’eau avec laquelle nous lavons nos pieds ou nos mains les nettoiera-t-elle moins bien pour être contenue dans des bassins de terre ? Une table aux pieds d’ivoire portera-t-elle d’ailleurs sans indignation un pain grossier et à vil prix ? Une lampe faite par un potier éclaire-t-elle moins que la lampe faite par un orfèvre ? Pour moi, je dis que le sommeil qu’on prend sur le plus humble grabat n’est pas moins doux que sur un lit d’ivoire. Puisqu’il suffit, pour nous couvrir, des peaux de brebis et de chèvres, pourquoi chercher des tapis de pourpre et d’écarlate ? Quelle vaine erreur, quelle trompeuse apparence du beau et de l’honnête nous aveugle au point de préférer à la sainte frugalité ces folles délices qui nous ont déjà été si fatales ? Voyez : le Christ mangea dans un plat de matière vile et commune ; il fit asseoir ses disciples sur l’herbe, il leur lava les pieds et les leur essuya avec un linge grossier : Dieu sans faste et sans orgueil, quoiqu’il fut le créateur et le maître de toutes choses ! il ne se fit point apporter du ciel un bassin précieux.