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la bouche du prophète Amos, proclame le malheur des riches. « Malheur à vous, leur dit-il, qui buvez un vin exquis dans de larges coupes, et qui vous étendez mollement sur des lits d’ivoire. » Il faut surtout respecter la pudeur et la bienséance.

La fable nous dit de Minerve qu’elle cessa de jouer de la flûte, parce qu’on n’en peut jouer sans que le visage s’enfle et se défigure. Quelle qu’ait été réellement cette Minerve, les païens en avaient fait la déesse de la bienséance. Il faut tenir la tête ferme en buvant, et ne pas la tourner de côté et d’autre ; avaler doucement et sans avidité, et prendre garde de rien répandre sur soi en buvant d’un seul trait. Quand on boit trop brusquement, on fait un bruit désagréable comme si l’on versait quelque liqueur dans un vase d’argile ; c’est donner aux assistante le spectacle le plus ridicule et le plus honteux. Rien, d’ailleurs, n’est plus nuisible que cette avidité. Pourquoi donc vous hâter de vous faire du mal ? on ne vous ôte point le verre, vous pouvez boire, il vous attend ; mais ne vous jetez point dessus, prenez-le posément, et buvez à votre aise. Votre soif s’apaise d’autant mieux par cette sage lenteur, que la boisson a le temps de descendre et de circuler librement dans tous vos membres ; et puis, en buvant ainsi, vous vous conduisez avec bienséance. Ce qu’on ôte à l’intempérance n’est pas perdu. « Ne mettez point votre force, dit le sage, à boire beaucoup. » L’excès du vin abrutit l’homme et le rend inutile. Les Scythes, les Celtes, les Ibères et les Thraces, nations belliqueuses, s’adonnent à l’ivrognerie, et croient que ce vice est honorable, et qu’il constitue le véritable bonheur de la vie ; mais nous, qui sommes une nation pacifique, nous éloignons de nous le tumulte et les injures, et nous buvons avec décence et sobriété, donnant à nos festins un nom convenable, image de la sainte amitié qui nous unit. Comment pensez-vous que le Seigneur a bu, étant homme ? Avec impudence, comme nous, ou avec honnêteté, tempérance et circonspection ? Sans doute, il a fait usage de vin ; car il l’a béni lui-même et il a dit : « Prenez, et buvez, ceci est mon sang, » le sang de la vigne. Le Verbe,