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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

Dans la fleur et la vigueur de l’âge, il faut prendre ses repas sans boire, afin que la sécheresse de l’aliment soit comme une éponge qui pompe le trop d’humeurs répandues dans le corps. Se moucher et cracher sans cesse est une marque d’intempérance, parce que l’intempérante est comme la mère des humeurs excessives qui nous affligent. Si la soif les presse, ils y remédieront avec un peu d’eau ; car il ne convient point d’en boire abondamment, de peur quelle n’affaiblisse les sucs nutritifs de l’aliment. Beaucoup d’eau nuit à la digestion, un peu la favorise.

L’excès du vin est incompatible avec la méditation des choses célestes ; ennemi de la tempérance, il étouffe et détruit toute sagesse. Le soir, on peut à son souper user d’un peu de vin, parce que d’ordinaire les occupations du soir sont moins sérieuses et demandent moins d’application L’air devient plus froid et la chaleur naturelle qui s’affaiblit a plus de besoin d’une chaleur étrangère. Mais à cette heure même il n’en faut user qu’avec la plus grande modération, et prendre garde d’aller jusqu’à l’excès.

On peut permettre aux vieillards de boire un peu plus de vin pour réveiller leur vigueur que l’âge a ralentie, et rétablir, par ce remède innocent, leurs forces usées. Les naufrages de l’ivresse ne sont plus guère à craindre pour les vieillards. La raison et l’expérience sont comme des ancres qui les attachent au port, et ils surmontent facilement les tempêtes passionnées que l’ivresse excite et déchaîne. Il leur est même permis de plaisanter avec grâce et modestie durant le repas. Enfin, ils peuvent boire, mais de manière à conserver toujours, avec la mémoire et la raison, un corps droit et immobile qui ne chancelle point sous le poids du vin. Ne vaut-il pas mieux, en effet, s’arrêter avant de tomber ?

Artorius, si je m’en souviens, dans son livre de la Longue vie, pense qu’il faut boire seulement pour humecter les aliments, et que c’est le plus sûr moyen de s’assurer une longue vie. Le vin donc doit être employé par les uns comme remède, par les autres comme joie et délassement. Le vin rend un homme, qui a bu un peu plus qu’à l’ordinaire, d’une humeur égale, com-