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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

y manger ? Pourquoi méprisez-vous l’Église de Dieu et humiliez-vous ceux qui sont pauvres ? » Ces gens insatiables, qui mangent au-delà des bornes de toute pudeur, se couvrent eux-mêmes de honte auprès des riches. Les uns et les autres commettent le mal ; les premiers, en outrageant les pauvres, les seconds en se déshonorant, par leur gourmandise, aux yeux des riches. L’apôtre tonne avec une juste indignation contre ces malheureux qui ont dépouillé toute pudeur et de qui les festins les plus magnifiques ne peuvent assouvir la voracité. C’est pourquoi, mes frères, lorsque vous vous assemblez pour manger, attendez-vous les uns les autres. Si quelqu’un a faim, qu’il mange chez lui, afin que vous ne vous assembliez pas pour votre condamnation.

Il faut donc s’abstenir de toute intempérance, et se garder de toute action basse et servile. Il faut manger avec bienséance et prendre garde de salir ou ses mains, ou sa barbe, ou le siége où l’on est assis. Que l’on ne mange point avec une avidité qui altère les traits du visage ; qu’on ne se tourne point de côté et d’autre ; que l’on porte la main au plat avec modestie et par intervalle ; qu’on ne parle point la bouche pleine, parce que la langue ne peut rendre qu’un son confus et inintelligible. Il ne faut pas non plus boire et manger tout à la fois. Ces deux actions différentes ne doivent point être confondues en une seule. Cela est de la plus grande intempérance. Soit que vous mangiez ou que vous buviez, faites tout pour la gloire de Dieu. N’oubliez jamais d’avoir devant les yeux la frugalité comme un but que vous voulez atteindre. Il me semble que le Seigneur a voulu exprimer cette vertu, lorsqu’il bénit les cinq pains et les deux poissons dont il fit un repas à ses disciples, nous montrant, par son exemple, qu’il ne faut point rechercher les mets exquis et délicats. Le poisson que prit saint Pierre, sur l’ordre de son maître, est le symbole d’une nourriture frugale, divine et ennemie des passions. Il nous invite, par ce qui sort de l’eau, à goûter l’appât de la justice et à réprimer l’avarice et la luxure. C’est là trouver la pièce d’or dans la bouche du poisson ; c’est combattre la vaine gloire, payer le tribut aux publicains, rendre