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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

les conviés quelqu’un de plus considérable que vous ; mais quand vous aurez été invité, allez vous mettre à la dernière place. » Et il ajoute : « Lorsque vous donnerez à dîner ou à souper, appelez-y surtout les pauvres, les infirmes, les boîteux et les aveugles. » Enfin, il propose cette parabole que vous connaissez, « un homme prépara un grand festin où il invita beaucoup de convives. »

Je comprends que la gourmandise cherche à déguiser ses excès sous un nom honorable et spécieux, et qu’elle trouve dans sa folie, comme dit un poëte comique, une absurde cause de joie ; car ils n’ont pas appris que Dieu a permis à l’homme le boire et le manger pour la nécessité et non pour le plaisir. Il n’est point dans la nature du corps humain d’être fortifié et entretenu par la variété et la délicatesse des aliments ; nous voyons, au contraire, que les hommes dont la nourriture est la plus simple et la plus commune sont plus sains, plus forts et plus robustes ; les valets le sont plus que leurs maîtres, et les paysans que leurs seigneurs. Ils ne sont pas seulement plus robustes, mais plus sages ; car les philosophes le sont plus que les riches. C’est que leur esprit n’est ni accablé par l’excès des viandes, ni abusé par la volupté. L’agape est une nourriture céleste, un festin raisonnable ; la charité supporte tout, elle espère tout, elle souffre tout, elle ne finira jamais. Heureux celui qui assistera au festin du royaume de Dieu ! Quelle chute, si la charité, qui ne peut mourir et qui habite le ciel, s’abaissait aux honteux plaisirs de la terre ! Pensez-vous que ces repas, qui seront abolis, je les estime quelque chose ? « Et quand je distribuerais toutes mes richesses pour nourrir les pauvres, dit l’apôtre, si je n’ai point la charité, tout cela ne me sert de rien. » Tout dépend de cette vertu ; vous serez parfaits si vous aimez le Seigneur votre Dieu et votre prochain. C’est dans les cieux qu’est le banquet céleste, dont le nom grec signifie repos ; celui de la terre reçoit de l’Écriture le nom de Cène. La Cène est l’œuvre de la charité, mais n’est point la charité elle-même. Elle est la marque d’une bienveillance fraternelle qui se plaît à faire part aux autres de ce qu’elle possède.