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SAINT CLÉMENT D’ALEXANDRIE.

cause de l’attrait naturel que le plaisir a pour nous, tandis que les aliments amers, quoiqu’ils révoltent les sens, entretiennent ou rétablissent la santé. Il y a mieux ; l’âpreté des remèdes fortifie souvent un estomac débile. Il en va de même de la coutume. Elle caresse et chatouille par une douceur apparente ; mais elle conduit à l’abîme ; la vérité, au contraire, nous emporte vers les cieux. Rude et austère au début, elle n’en est pas moins la meilleure nourrice de la jeunesse ; tantôt gynécée recommandable par la gravité des mœurs ; tantôt sénat consacré par la sagesse et la prudence. Qu’il soit difficile de l’aborder, ou qu’elle réside hors de la portée des hommes, ne le croyez pas ; elle est près de nous ; elle habite dans nos maisons, et, comme l’insinue Moïse, l’homme orné de la sagesse est tout entier dans ces trois organes, la main, la bouche, le cœur. Tel est le véritable symbole de la vérité. Pour l’embrasser complètement, il faut le concours de ces trois choses : prudence, action, parole. Mais la foule des plaisirs, en voltigeant autour de mon imagination, m’écartera de la sagesse, dites-vous. Ne craignez rien. Vous passerez sans qu’il vous en coûte, et avec le regard du dédain, à côté des frivolités de la coutume, à peu près comme le jeune homme brise les hochets qui ont diverti son enfance.

Au reste, la puissance divine, en brillant sur l’univers avec une incroyable rapidité et une bienveillance qui ouvre à tous un libre accès, a rempli le monde de la semence du salut. Non ; ce n’est pas sans le concours d’une éternelle Providence qu’a été accomplie par le Seigneur, dans un si court intervalle de temps, une si prodigieuse révolution ; par le Seigneur, méprisé en apparence, mais adoré de fait, expiateur, sauveur, miséricordieux, Verbe divin, Dieu véritable sans aucun doute, égal au maître de l’univers, parce qu’il était son fils et que « le Verbe était en Dieu. » La prédication proclame-t-elle sa doctrine, la foi l’accueille ; s’incarne-t-il pour revêtir la forme de la créature et jouer sur la scène de notre monde le rôle de l’humanité, la foi reconnaît encore à travers ces voiles obscurs l’athlète qui combat légitimement, et qui aide sa créature dans